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Un peu de théorie

Avons nous besoin de compost au jardin ?

Attention sujet polémique ! J’en avais déjà parlé dans l’article « Jardiner sol vivant : quelles techniques? » et dans les commentaire s’y rapportant. Alors le voici ce fameux article sur le compostage !

Tout d’abord, je vous donne mes deux principales sources bibliographiques d’ouvrage qui font la promotion du compost :


Collaborer avec les bactéries et autres micro-organismes : Guide du réseau alimentaire du sol à destination des jardiniers Par Jeff Lowenfield et Wayne Lewis, Ed. du Rouergue 2008
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Compostons ! : Pour redonner sa fertilité à la terre Par Jean Paul Collaert, Ed. de Terran 2008
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Ce sont deux très bon ouvrages que je vous recommande pour approfondir vos connaissances sur le sujet.

Composter, qu’est ce que cela veut dire ?

Commençons par clarifier ce qui se cache derrière cette notion, finalement assez vague de compostage. En effet il y a peu de chose en commun entre le « compostage » de surface et la production de composts (de déchets verts, de boues d’épuration…) en andains de plusieurs mètres de haut dans les stations de compostage. Je vais ici me contenter de parler des composts accessibles à l’échelle du jardin individuel.

Les composts peuvent être réalisés au jardin suivant des processus très variés impliquant ou non une montée en température. Voici un aperçu de ce qui peut se faire :

Le compostage en tas : Les ingrédients sont rassemblés en un tas formé le plus souvent en une seule fois. Ce type de compostage implique généralement une montée en température, qui idéalement doit atteindre 65°C. Le tas est régulièrement retourné pour homogénéiser les ingrédients et pour que la totalité du tas se retrouve à un moment donné dans les zones chaudes.

Compostage en conteneurs : Plus approprié en cas de petits apport réguliers de matières à composter (cas des déchets de cuisine). La montée en température est ici beaucoup plus faible.

Lombricompostage : Outre son intérêt pédagogique (voir l’article « pédofaune et lombricompost »), le lombricompost est une solution particulièrement adaptée à ceux qui vivent en appartement. Il a aussi l’avantage de fournir un jus qui est un très bon engrais organique.

« Compostage » de surface : Les guillemets autours du mot compostage sont là pour indiquer qu’on est là aux limites de la pertinence de ce terme. En effet, cette pratique consiste à disposer des matières organiques directement sur le sol à et à les laisser évoluer sur place, la nuance avec un paillage est assez floue. On a affaire ici à des processus similaires à la transformation d’une litière de feuilles mortes et de petits bois en forêt. C’est une pratique qui me semble incontournable lorsqu’on jardine sol vivant !

Quels sont les objectifs agronomiques du compostage ?

Les partisans du compostage vantent ses qualités sous différents angles. Le principal étant l’ensemencement en micro-organismes. Mais on peut aussi mettre en avant son rôle en tant que fertilisant et amendement. Revenons successivement sur ces trois fonctions :

Ensemencement en micro-organismes : Le compost permet de « cultiver » toutes sortes d’organismes depuis des bactéries jusqu’à des insectes ou des vers de terre qui font partie de la pédofaune et de la pédoflore. Amener un compost au sol permet donc d’y inoculer ces organismes. Cet avantage est aujourd’hui largement mis en avant et c’est le plus récurent dans les deux ouvrages cités en début d’article. Toutefois il est avéré que cet ensemencement n’est vraiment utile que dans un sol appauvrit en ces organismes. Dans un sol en bonne santé biologique, l’apport de compost sera superflu vis à vis de cette fonction.

Par exemple, récemment, alors que j’avais été invité à parler BRF à une journée de formation à l’école d’horticulture de Lullier près de Genève, un des intervenants, Jacques Fuchs, spécialiste du compostage et qui a lui aussi largement insisté sur cet aspect « inoculum », nous a montré des résultats indiquant que chez un maraîcher en bio depuis de nombreuses années l’apport de compost n’avait pas de résultats marquant en terme de régulation biologique des ravageurs alors que cet effet était flagrant dans des serres où le sol avait été préalablement stérilisé.

Amendement : Le compost amène au sol beaucoup de matière plus ou moins humifiées qui participent à la structuration du milieu et fournissent un habitat aux organismes du sol.

Rôle fertilisant : L’activité biologique du compost consomme une partie du carbone que contiennent les matières fraîches initiales et donc concentre les nutriments, le compost a ainsi un léger effet engrais organique. Effet qui est toutefois beaucoup plus faible qu’avec un engrais organique proprement dit.

Compost versus matière fraîches

Le compost est toujours issus de matières organiques fraîches qui peuvent être très variées : excréments animaux, WC secs, feuilles mortes, tontes de gazon, sciures, épluchures de légumes… Je ne reviens pas sur l’intérêt évident de composter les matières d’origine animale pour les assainir. Si vous avez chez vous des WC sec ou des bêtes dont vous récupérez le fumier pour le potager, le compostage me paraît incontournable. En revanche pour les composés d’origine végétales, c’est moins évident. Deux raisons principales à cela :

  • Le compostage détruit les composés les plus faciles à consommer pour la vie du sol. Et à la fin, il ne reste donc que des composés stables et difficilement attaquable : les organismes du compost se sont servis et n’ont pas laissé grand chose pour ceux du sol… Dommage. Bien sûr cela sera moins vrai si vous utilisez un compost jeune ou réalisé à basse température, mais quand même pourquoi vouloir absolument composter alors que la grande majorité des matières organiques sont applicables directement au sol pour le plus grand bonheur des champignons, vers de terres, cloportes et autres collemboles de votre potager ?
  • De plus le compostage libère une grande partie du carbone contenu dans les matériaux initiaux sous forme de gaz carbonique, voire de méthane si le compostage se déroule dans de mauvaises conditions (anaérobiose). Ce carbone aurait pourtant pu être transformé in-situ et intégré aux matières organiques du sol ou avoir participé au métabolisme de notre cheptel souterrain avant de partir dans l’atmosphère !

Vous l’aurez compris, je ne suis pas du tout un adepte du compostage, je suis même assez réservé sur son utilité agronomique, et je lui préfère d’une façon générale l’application de matières organiques fraîches. Par exemple si vous avez un grand potager paillé avec du foin ou de la paille vous pouvez mettre vos déchets de cuisine directement sous le paillage, sans passer par le composteur. Par contre, il est important alors de les mettre sous le paillage pour deux raisons : esthétique tout d’abord, ce n’est pas très agréable de voir un jardin avec plein de déchets en train de pourrir un peu partout ; agronomique ensuite, car en maintenant l’humidité des déchets, le paillage va faciliter leur minéralisation.

Un autre reproche que je fait au compostage est qu’il oblige à aller chercher de grosses quantité de matières qui n’auraient pas eu besoin d’être compostées pour être valorisées. En effet, l’équilibre matières brune / matières vertes implique d’aller chercher des quantité importantes de feuilles, pailles, BRF… pour équilibrer le compost, alors que ces matières sont utiles soit sur leur lieu de production (cas des feuilles dont la décomposition est très importante pour la santé des arbres dont elles sont issues) soit directement en paillage du jardin.

J’ai bien conscience de bousculer en écrivant tout cela et surtout d’aller à l’encontre d’un des piliers du jardinage bio classique. Je conclue en résumant ma pensée en trois points :

  • Je ne pars en croisade contre le compostage, mais je cherche juste à le remettre à sa juste place : celui d’une très bonne méthode de traitement des déchets organiques que l’on peut pas valoriser autrement.
  • Les composts peuvent tout à fait faire partie des techniques utilisées dans un jardin sol vivant, comme le montre par exemple l’expérience de Jean Marie Lespinasse. Leur intérêt est d’autant plus net que le sol est pauvre en activité biologique.
  • Sur un sol vivant, il est préférable d’utiliser les ingrédients du compost directement en frais au jardin en « compostage » de surface.

Et si vous êtes un adepte du compostage, je vous invite à vous demander pour chaque ingrédient de votre compost, pourquoi l’y mettez et pourquoi vous pensez avoir besoin de compost au jardin et à m’en faire part dans en commentaire ci-dessous ! Que le débat nous enrichisse mutuellement pour des sols toujours plus vivants dans nos jardins !

A tout de suite et au plaisir de vous lire !

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Jardinons

C’est le moment d’installer les BREF !

Chers jardiniers « sol vivant » !

Après un début de semaine glacial, voilà que février présente désormais des allures de printemps, du moins sur mes riants coteaux gascons ! Alors c’est le moment d’aller un peu au jardin et de faire ce que Dominique Soltner appelle le BREF (Bois Raméal Entassé Foulé) pour préparer certaines parcelles pour le printemps.

C’est ce que nous avons fait ce week end avec des rameaux issus de tailles de lauriers du Caucase (alias laurier cerise, alias laurière, alias laurier palme…) et de laurier noble. Notons au passage que malgré leur nom de laurier ces deux plantes sont extrêmement éloignées sur le plan botanique. Ici leur seul point commun est d’être à feuille persistantes et c’est ce qui nous intéresse ici ! En d’autres endroits, suivant la végétation disponible, nous aurions pu utiliser du chêne vert, du chêne liège, de l’arbousier, du houx…

Un chat vient vérifier que les BREF ont été bien installés! Au premier plan un andain de Laurier noble et au fond un andain de laurier du Caucase.

En quoi cela consiste-t-il ?

On positionne un petit andain de branche directement sur le sol enherbé. Ici dans le Gers, la période idéale semble être justement février pour le faire. Ensuite, il n’y a plus qu’à attendre : l’herbe va être étouffée par les branchages feuillés et va se décomposer, les feuilles vont peu à peu se dessécher et tomber des rameaux. Tout cela va alimenter la vie du sol, l’ameublir et fin avril nous enlèveront ces branches pour les remplacer par un paillage de foin et aurons alors une parcelle toute prête à accueillir des cultures d’été type tomate, courgettes, courges, aubergines…

Voilà une des techniques les plus prometteuses pour préparer un terrain sans se fatiguer et commencer à cultiver directement sur un sol riche et bien vivant ! Alors, à vous de jouer, vous me direz ensuite comment ça a marché chez vous ! Et si vous avez déjà expérimenté le BREF, dites nous en commentaire ci dessous quelles sont les périodes et les essences qui vous semble les plus adaptés à votre climat et à votre sol !

Vous pouvez voir le résultat de cet essai sur l’article posté au mois d’août sur le même thème !

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Lecture d'ouvrage

« Collaborez avec les bactéries et autres micro-organismes du sol » de J. Lowenfield et W. Lewis


En ce mois de janvier, j’ai envie de proposer une nouvelle forme d’article sur ce blog, en l’occurrence des lectures d’ouvrage et pour commencer le bal, je vous propose un très bon livre paru aux éditions du Rouergue en 2008 : « Collaborer avec les bactéries et autres microorganismes » par Jeff Lowenfield et Wayne Lewis et traduit de l’anglais par Jean René Dastugues. Le sous titre nous met d’ailleurs bien dans l’ambiance de ce livre passionnant : « Guide du réseau alimentaire du sol à destination des jardiniers ». Oh bien sûr, je ne suis pas à 100% d’accord avec les auteurs, loin de là, mais leur approche de la biologie des sols et leur manière de l’appliquer au jardinage m’apparaît très pertinente sur beaucoup de points. En plus de cela, je trouve le livre bien écrit et agréable à lire malgré le peu d’illustration et l’absence de second niveau de lecture.

Le contenu de l’ouvrage

Sa structure est formée d’une première partie consacrée à la description du sol, essentiellement sous l’angle de la biologie et d’une seconde à la description de pratiques de jardinage censées respecter et tirer partie de cette vie.

  • Première partie : La science de base

Cette première moitié de l’ouvrage est un véritable traité de pédologie, et plus particulièrement de pédobiologie, à destination d’un large public de jardinier pas forcément spécialiste en la matière. Pour autant, même des professionnels ont de quoi y trouver des informations utiles et des connaissances nouvelles en la matière.

Les auteurs entament l’ouvrage en jetant les bases de leur réflexion : les réseaux alimentaires du sol rassemblent des milliards d’organismes dans la moindre cuillère à café  de terre, en particuliers des bactéries et des champignons, mais aussi pléthore d’organismes unicellulaires, comme les algues et surtout les protozoaires et quelques animaux de plus grande taille, dont certains visibles à l’œil nu. Tous ces organismes interagissent et sont tous totalement dépendant de l’action des végétaux qui nourrissent ce petit monde via des exsudats racinaires au niveau de la rhizosphère, cette mince pellicule qui entoure les racines vivantes et qui est extrêmement riche en vie microbienne. Et cette vie microbienne en retour a divers effets positifs directement ou indirectement pour la plante : amélioration de la structure du sol, libération de nutriments, maîtrise des pathogènes, gestion de l’azote. Ce dernier point retient particulièrement l’attention des auteurs  qui mettent en parallèle la forme d’azote majoritaire (nitrates versus ammonium) avec les microbes dominants du système (bactéries vs champignons).

Forts de cette introduction, ils consacrent tout un chapitre à la description physico chimique des sols incluant les mécanismes de la pédogenèse, la texture, la structure…

S’en suivent une soixantaine de pages passionnantes consacrées à la description des différents habitants de nos sols en passant successivement en revue les bactéries, les champignons, les algues, les moisissures visqueuses (myxomycètes), les protozoaires, les nématodes, les arthropodes, les vers de terre, les gastéropodes, et les vertébrés. Impossible ici de résumé ces pages si denses en information. Je puis juste vous dire qu’elles justifient à elles seule la lecture de l’ouvrage, même si, comme c’est mon cas, vous avez déjà de bonnes bases en biologie des sols !

  • Seconde partie : Appliquer la science du réseau alimentaire du sol à l’entretien du jardin

Les auteurs basent leur approche sur la bipolarité évoquée en introduction : Bactéries/champignons et nitrates/ammonium. Dans la nature les écosystèmes pionnier, dominés par les herbacées portent des végétaux qui préfèrent les sols à dominante bactérienne et où l’azote se trouve majoritairement sous forme de nitrates. A l’inverses les écosystèmes très matures, de type forêt primaire portent des végétaux qui préfèrent les sols à dominante fongique où l’azote se trouve majoritairement sous forme ammoniacale. Ceci appliqué au jardin indique par exemple que les annuelles et les légumes préfèrent un ratio champignons/Bactéries (C/B) inférieur à 1, les arbres fruitiers un ratio de l’ordre de 10 à 50, alors que les conifères recherchent un ratio allant de 50 à 1000 suivant les espèces !

Une fois que vous avez fait connaissance avec les réseaux alimentaires de votre sol, il faut mettre en œuvre les techniques qui permettent de jardiner avec ce réseau et non contre lui en le détruisant à par le travail du sol, les engrais chimiques ou les pesticides. Pour cela les auteurs proposent trois outils : le compost, le mulch et les jus de compost.

Le compost, dont ils détaillent les processus de fabrication est vanté pour la quantité de micro-organismes qu’il contient et préconisé justement pour ensemencer le sol en ces organismes.

Le mulch est prescrit non seulement pour limiter l’évaporation et la pousse des herbes ou réguler la température du sol, mais aussi et surtout pout nourrir et abriter la vie du sol. Du coup, le choix de tel ou tel paillis influence le développement de tel ou tel organisme donc permet d’orienter vers des populations à dominante bactériennes ou fongiques suivant le type de culture pratiqué. C’est ainsi que les paillis « vert » (tontes de gazon par exemple) sont plutôt « bactériens » alors que les paillis « brun » (BRF, feuilles mortes…) sont plutôt « fongiques ». L’humidité du paillis entre aussi en ligne compte, puisque plus le paillis est humide plus est « bactérien ».

Les jus de compost sont en quelque sorte des concentrés d’organismes du compost et peuvent être utilisés aussi bien en pulvérisation sur les feuilles qu’en arrosage. L’objectif est ici d’amener les microorganismes bénéfiques le plus rapidement possible là où ils sont utiles. Ces jus sont élaborés à partir de compost ou de lombricompost mis à infuser dans une eau constamment brassés pendant plusieurs jours pour rester en aérobiose. Le jus est ensuite à appliquer dans les 3 jours qui suivent sont élaboration. Le non composteur que je suis a bien noté la petite phrase discrète qui dit que le compost peut être remplacé par des turricules de vers de terre.

Les derniers chapitres du livres sont ensuite des focalisations sur des applications des ces trois outils à la pelouse, dans un premier temps, puis aux vivaces, arbres et arbustes et enfin aux légumes et plantes annuelles.

Mon point de vue sur l’ouvrage

Tout d’abord au niveau des pratiques, j’apprécie beaucoup l’état d’esprit du travail de ces auteurs et dans lequel je me retrouve totalement. En effet, on est ici totalement dans le jardinage sol vivant avec un désir de compréhension des mécanismes biologiques à l’œuvre dans le sol et la mise en œuvre de techniques qui se basent sur la vie du sol pour cultiver des végétaux. En plus leur approche de ce type de jardinage est basée sur un formidable exposé sur la biologie des sols. Toutefois, au niveau des techniques proposées, même ce qu’ils proposent est intéressant je trouve l’exposé incomplet, la thématique couverts végétaux / engrais verts notamment est la grande absente de cet ouvrage.

Le point focal du livre est la bipolarité bactéries/champignons. Que faut-il en penser ? Je reconnais qu’elle m’apporte plus de questions que de réponses, ce qui est en soi très positif ! En effet, dans mon expérience personnelle du potager, je remarque que les techniques qui ont permis de basculer vers un potager productif sont des techniques de paillages cellulosiques qui ont probablement été favorables aux bactéries et ont donc été plus favorable aux légumes annuels que ne l’était le seul BRF. Alors qu’à quelques mètres de là, ce même BRF faisait merveille sur des arbres fruitiers. Toutefois, de nombreuses expériences montrent un apport très positif du BRF sur les légumes, observation difficiles à accorder au cadre théorique proposé dans l’ouvrage.

Toujours par rapport à cette bipolarité et les deux autres qui y sont rattachées : nitrates/ammonium et plantes annuelles/arbres, il est vraisemblable que le modèle soit très simplifié par rapport à ce qu’il est dans la nature où les limites me semblent beaucoup plus floues que ce qui est décrit ici. Sujet fort intéressant que je dois m’efforcer de creuser dans les semaines et les mois qui viennent !

En conlusion, je trouve que c’est un livre qui, malgré les limites probables de son approche, est un ouvrage de référence pour le jardinier « Sol Vivant ». En effet, la qualité de ses exposés sur la vie du sol et la proposition d’un modèle pour domestiquer les réseaux alimentaires du sol, enrichissent grandement nos réflexions sur ces sujets ! Je trouve que c’est un ouvrage à lire absolument !

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En bonus : l’annexe 1 du livre

En guise de résumé de la seconde partie et de guide pour mieux comprendre la démarche des auteurs, voici l’annexe où sont listés les 20 principes « du jardinage avec le réseau alimentaire du sol » :

1. Certaines plantes préfèrent les sols dominés par les champignons, d’autres préfères ceux dominés par les bactéries.

2. La plupart des légumes, plantes annuelles et plantes grasses préfèrent avoir leur azote sous forme de nitrates et se portent mieux dans les sols à dominante bactérienne.

3. La plupart des arbres, arbustes, et plantes vivaces préfèrent avoir leur azote sous forme ammoniacale et se portent mieux dans les sols à dominante fongique.

4. Le compost peut être employé pour inoculer les microorganismes bénéfiques à la vie des sols de votre jardin et introduire, entretenir ou modifier le réseau alimentaire du sol.

5. Répandre du compost avec son réseau alimentaire du sol à la surface du sol va inoculer à ce dernier le même réseau alimentaire.

6. Les matériaux organiques bruns ou fanés soutiennent les champignons ; les matériaux organiques frais et verts soutiennent les bactéries.

7. Le paillis répandu en surface a tendance à être favorable aux champignons ; le paillis incorporé superficiellement a tendance à être favorable aux bactéries.

8. Si vous mouillez et broyez complètement le paillis, cela accélère la colonisation par les bactéries.

9. Les paillis plus grossiers et secs sont favorables à l’activité fongique.

10. Les sucres aident les bactéries à se multiplier et grandir ; les algues, les acides fulviques et humiques et la poussière de phosphate aident les champignons à pousser.

11. En choisissant votre compost au départ et les nutriments que vous allez y ajouter, vous pouvez faire des jus soit fongiques, soit bactériens, ou bien équilibrés.

12. Les jus de compost sont très sensibles à la présence de chlore et de conservateurs dans l’eau de brassage et dans les ingrédients.

13. L’utilisation industriels tue tout ou partie des microorganismes du sol.

14. N’utilisez pas d’additifs ayant de fort taux de NPK.

15. Après une vaporisation ou un arrosage du sol avec des produits chimiques, appliquez toujours du jus de compost

16. La plupart des conifères et des arbres à bois durs forment des symbioses avec des champignons EcM.

17. La plupart des légumes, des plantes annuelles, des plantes grasses, des arbustes, des arbres à bois tendre et des plantes vivaces forment des mycorhizes avec des champignons MA.

18. Le fait de retourner le sol et de déranger de manière excessive détruit ou endommage gravement le réseau alimentaire du sol.

19. Mélangez toujours des champignons MA avec les graines des plantes annuelles et des légumes au moment de les planter ou appliquez-en sur les racines au moment du repiquage.

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Un peu de théorie

Les mycorhizes : quand végétaux et champignons s’associent pour le meilleur !

Ce soir, j’ai envie de vous parler d’un sujet qui me tient particulièrement à cœur et qui n’est pas encore très connu du monde des jardiniers amateurs. Il s’agit de la symbiose entre les racines d’une plante et un champignon : la mycorhization. Depuis 2006 je me passionne pour ce sujet qui n’a pas finit de m’étonner et de me fasciner. J’en avais d’ailleurs fait le sujet de mon intervention lors du colloque BRF de Lyon en février 2007. Mais sans plus tarder entrons dans le vif du sujet !

Les mycorhizes dans l’histoire du vivant

L’histoire des mycorhizes débute il y a plus de 450 millions d’années, au Dévonien. Il semblerait que la symbiose mycorhizienne ait été indispensable à la colonisation des continents par les végétaux ! A cette époque il s’agissait de la symbiose entre des champignons archaïques, les gloméromycètes, formant des mycorhizes dites arbusculaires (MA) ou endomycorhizes (j’y reviendrai) et des végétaux également archaïques, de l’embranchement des bryophytes (mousses…). Plus tard ces champignons s’associèrent successivement à des fougères et des prêles puis aux premiers conifères à la fin de l’ère primaire. A cette époque la végétation était encore cantonnée aux terres alluviales meubles, le restant des surfaces continentales étant encore le domaine réservé des lichens.

Les fructifications au premier plan appartiennent à un champignons ectomycorhizien qui vit en symbiose avec le pin maritime en arrière plan.

Puis l’évolution du vivant suivant son cours, une nouvelle symbiose apparu : les ectomycorhizes (EcM) au système enzymatique beaucoup plus puissant que les premières. De nombreux gymnospermes (conifères) s’adaptèrent à cette nouvelle symbiose pour aller conquérir les les surfaces continentales non alluviales, alors rocheuses et dépourvues de végétation.

A la fin de l’ère secondaire apparurent les premières plantes à fleurs (Angiospermes) qui durent elles aussi choisir entre EcM (cas des chênes, hêtres, bouleaux, noisetiers…) et MA (cas des plantes herbacées, des érables, frênes… et de tous les arbres tropicaux). Certaines toutefois n’ont jamais choisit et forment les deux symbioses (cas des peupliers par exemple), d’autres en ont inventé une autre (cas de certaines éricacées – myrtilles, rhododendrons -, des orchidées…), et enfin certaines se sont purement et simplement affranchit de la symbiose mycorhizienne et n’ont jamais besoin d’un champignon symbiotique (cas des Brassicacées et des Chénopodiacées).

Actuellement, les « vielles » MA concernent encore 85% des espèces végétales ! Malgré son grand âge, cette symbiose reste une des plus grandes réussites du vivant ! Les EcM concernent seulement 5 % des végétaux mais occupent de grandes surfaces dans les forêts tempérées et surtout boréales.

Les mycorhizes au jardin

Au potager, il existe toute une diversité depuis des plantes très dépendantes de la mycorhization (légumineuses, carottes…) jusqu’à des plantes non mycorhiziennes. Ces dernières sont surtout les Brassicacées (choux, navets, radis, moutarde…) et les Chénopodiacées (épinards, betteraves, blettes, quinoa…). Toutes les plantes mycorhiziennes du potager forment des MA.

Les arbres fruitiers sont pour la plupart endomycoriziens (MA) (pommiers, poiriers, pruniers, cerisiers, noyers…). Quelques uns toutefois forment des EcM, comme les noisetiers et les châtaigniers.

Parmi les plantes d’ornements, si la plupart des herbacées sont endomycorhiziennes (MA), c’est plus partagé en ce qui concerne les ligneux. Par exemples, érables, frênes et ifs sont endomycorhiziens, alors que chênes, pins et tilleuls forment des EcM.

Des mycorhizes pourquoi faire ?

Quels est donc l’intérêt pour ces végétaux de former une symbiose avec un champignon ? Dans ce qui suit, je vais surtout m’attarder sur les MA qui sont les plus fréquentes au jardin, mais tout ceci est en grande partie vrai pour les EcM.

Le premier avantage du mycélium des champignons est d’être beaucoup plus fin que les racines. Du coup il peut aller chercher de l’eau et des nutriments dans des pores extrêmement petits, multipliant ainsi par au moins 10 le volume de sol exploré par la racine ! Il est de plus très performant pour mobiliser des nutriments très peu mobiles comme le phosphore et le zinc. Il représente donc une aide souvent indispensable pour permettre à la plante d’accéder à ces éléments.

Les champignons MA aident aussi la plante à lutter contre ses adversaires, qu’il s’agisse de champignons parasites ou même d’insectes herbivores !

Et comme si cela ne suffisait pas, les gloméromycètes (groupe auquel appartiennent tous les champignons MA) produise une substance appelée glomaline qui structure le sol alentour, le rendant ainsi plus favorable au développement de la végétation.

En d’autres termes le champignon mycorhizien sert à la plante à la fois de mineur, de traiteur, de médecin, de vigile et d’ingénieur en aménagement du territoire… qui dit mieux ?

En juste retour de ces services, les plantes, en bonnes cuisinières écolo (elles fonctionnent à l’énergie solaire), nourrissent leur partenaire fongique avec des sucres élaborés avec soin lors de la photosynthèse.

Comment cultiver avec les mycorhizes ?

 

Pour bien comprendre comment les utiliser avec profit au jardin, voyons d’abord ce qui perturbe le développement voire la survie de ces champignons :

  • En premier lieu les engrais phosphatés, en effet, un des principaux apports du champignons mycorhizien est de fournir du phosphore à la plante. Si le sol en est saturé, la plante n’a aucune difficulté à aller chercher cet élément et ne prend donc plus la peine de nourrir ses mycorhizes qui disparaissent peu à peu. Notez que cela est vrai que les engrais soit synthétiques ou organiques !
  • Le travail du sol qui brise le mycélium et enfoui les spores dans des zones peu favorable à leur développement.
  • La monoculture de plantes non mycorhiziennes (colza, moutardes, betteraves, choux, épinards, mais aussi lupins…) qui, surtout si elles sont trop bien désherbées, coupent les champignons mycorhiziens de leur source de carbone.
  • Les pesticides et en particuliers les fongicides, même si la plupart de ces produits ne tuent pas directement les champignons mycorhiziens, leur usage est d’un effet négatif marqué sur les populations.

Les pratiques qui sont favorables au bon développement de ces champignons et donc à leur actions bénéfiques sur vos cultures sont donc :

  • une fertilisation phosphorée très réduite ;
  • un travail du sol minimal, voire nul ;
  • une couverture du sol pendant des périodes aussi longues que possible avec des végétaux vivant (couverts végétaux) comprenant une proportion importante de plantes mycorhiziennes : par exemple en mélangeant à vos engrais vert de moutarde avec une légumineuse (fèverole, vesce, pois, fénugrec…) ;
  • un mode de culture sans pesticides ;
  • il est également possible d’inoculer vos plantes avec des spores de champignons mycorhiziens du commerce, vous trouverez par exemple des inoculum endomycorhiziens (MA) sur le site solvivant.fr.

Voilà donc un outil majeur de compréhension du système sol-plante directement applicable à votre pratique du jardinage sol vivant ! Je vous invite à laisser vos commentaire ci dessous pour me poser toute question, remarque, témoignage relative à ces merveilleux champignons ! A tout de suite !

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Jardinons

Un défi au jardin pour 2011

2011, une nouvelle année débute et avec elle son lot de résolutions diverses et variées sur tous les plans de nos vies : professionnelle, amoureuses, familiales… Et pour le jardin ? Que diriez vous aussi de faire de bonnes résolutions pour avoir jardinage encore plus « sol vivant » qu’en 2010 ?

Plutôt que de résolution, je vous propose un défi : je vous invite à choisir un (au moins) défi à réaliser au jardin cette année. Oh ce il ne s’agira pas de se mettre en tête de cultiver 2000m² de plus qu’en 2010, non soyons raisonnables, et puis ce n’est peut être pas ce qu’il y a de plus pertinent…

Voici quelques exemples d’objectif que vous pouvez vous donner :

  • faire 10m² de potager sans aucun travail du sol ;
  • réussir les carottes bleues du Cameroun que vous n’avez jamais réussi jusqu’à présent, ou jamais essayé ;
  • réaliser vos semis de tomates tahitiennes en godets au lieu d’aller acheter des plans sur le marché ;
  • réaliser en semis en pleine terre les betteraves que vous avez réussie l’année dernière avec des plans achetés (ça c’est un de mes objectifs pour cette année 😉 ) ;
  • faire votre premier purin d’orties ou de consoude ;
  • tenter de limiter l’irrigation à un arrosage par semaine, même au plus chaud de l’été ;
  • commencer un élevage de castor pour qu’ils vous fassent du BRF avec les tailles de vos fruitiers ;

Bref, les idées ne manquent pas et je suis sûr que vous en trouverez une à mettre en œuvre pour la première fois en 2011. Et pour vous impliquer encore plus, je vous invite à m’en faire part avant le 31 janvier. De mon côté, je me fixe le défi de vous fournir une aide, si vous en exprimez le besoin, pour réaliser cet objectif. C’est à dire que si j’ai une réponse à vous proposer, je vous la propose et si je n’en ai pas, je m’engage à trouver une source bibliographique ou webographique susceptible de vous aider. Et bien sûr, si la réponse de vous satisfait pas, vous avez l’autorisation de me harceler jusqu’à ce que je vous donne une indication qui vous convienne !

Partant pour ce petit jeu ? Alors à vous, j’attends vos messages ou vos commentaires (oui, c’est encore plus impliquant si vous mettez votre objectif en commentaire ci-dessous) !

Et en attendant, bonne année 2011 !

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Observons

La pédofaune et le lombricompost

La vie du sol… Mais qui donc se cache sous ce terme générique ? Beaucoup de monde en fait : bactéries, algues, protozoaires, champignons, animaux. A notre échelle, les plus faciles à observer sont les plus gros, donc ces derniers.

Pour mieux faire la connaissance de ces animaux du sol qui sont regroupés sous le terme de pédofaune, je vous invite à  vous éloigner des sols de vos potager pour vous rapprocher d’un objet de plus en plus fréquent dans nos jardins, caves, ou même maisons et appartements : le lombricomposteur. En effet, les animaux au travail dans ce dispositif sont tous des animaux du sol, mais ils sont beaucoup plus facile à observer ici que dans leur milieu naturel. Allons donc à la rencontre des lombrics épigés, des enchytréides, des collemboles et autres acariens si fondamentaux dans le fonctionnement des sols et si facile à observer sur le plastique noir du lombricomposteur.

Cliquez sur les images ci-dessous pour les agrandir, il y en a bien besoin pour voir les petites bêtes dont je parle ici !

Sur cette première photo, on voit bien évidement l’animal qui donne son nom au lombricompost, c’est à dire un ver de terre. Toutefois, ce n’est pas lui qui, dans les sols, brasse inlassablement la terre de bas en haut en laissant en surface ces fameux « tortillons » de terre, ou « turricules », dont la composition est beaucoup plus riche que le sol environnant. Non, celui ci se contente de vivre dans la litière, au milieux des matières organiques plus ou moins fraîches, il se classe parmi les vers de terre dit « épigées », ceux vivant tout le temps en surface. Leur rôle dans le sol est de brasser et fragmenter ces matières organiques, facilitant ainsi leur transformation par les champignons ou les bactéries (dans le cas du lombricompost, il s’agit plutôt de bactéries). D’ailleurs les rôles des autres animaux que je présente ci dessous sont tout à fait similaires, et pour cause, nous sommes dans un milieu plein de matières fraîches, riches en plein début de biotransformation.

Les petits vers blanc et allongés visibles en grand nombre sur cette photo sont des cousins des précédents, comme eux, ils font partie de l’embranchement des vers annélides. Il s’agit d’enchytréides. Dans les sols, ils sont surtout présents dans des litières relativement acides dans lesquelles l’activité biologique est réduite et dominée par les champignons. Au potager, ils sont très marginaux, par contre, ils sont très présents dans certaines forêts, en particulier sous résineux et en climats plutôt froids.

La photo est légèrement floue, je vous pris de m’excuser, mais ce n’est pas facile de prendre des photos nettes sans flash dans la cave obscure et exigüe de ma charmante compagne. Ici deux animaux apparaissent à la surface de ce sac en papier emplit de déchets de cuisine : les collemboles et les acariens.

Les collemboles sont les petits points blanc allongés. Il s’agit d’arthropodes proches des insectes. En fait, ces animaux sont des sortes d’insectes archaïques qui existent depuis au moins 380 millions d’années. A l’instar des insectes, ils ont 3 paires de pattes, mais contrairement à eux ils ne présentent pas de forme larvaires et aucune espèce n’est pourvue d’ailes… Par contre de nombreuses espèces de collemboles possèdent une « furca », sorte de catapulte situé à l’arrière de leur corps et grâce à laquelle ils peuvent faire des sauts de plusieurs centimètres et ainsi échapper à des prédateurs. Ils sont parmi les animaux les plus nombreux dans un sol riche en matières organiques en décomposition (typiquement : la litière forestière). De nombreux collemboles sont fongivores (se nourrissent de champignons), mais d’autres sont carnivores ou encore détritivores (se nourrissent de matière organique en décomposition) comme ici.

Les acariens sont un vaste ordre voisin des araignées. Ils partagent avec ces dernières le fait d’avoir 4 paires de pattes, mais leur corps n’est pas segmenté : les araignées ont une « tête » (céphalothorax) et un abdomen bien distinct, ce qui n’est pas le cas des acariens. De plus, si les araignées sont toutes carnivores, les acariens présentent des types biologiques beaucoup plus diversifiés : carnivores, bien sûr, mais aussi herbivores, comme les fameuses « araignées » rouges que connaissent bien les jardiniers, parasites, comme les tiques, ou encore détritivores, comme les petites bêtes brun rouges que l’on distingue ça et là sur la photo ci dessus et aussi sur la photo précédente où on en voit des petits amas se blottir dans les trous du couvercle du lombricomposteur.

Bien sûr le portrait de la pédofaune que je dresse ici est très partiel, il y manque les autres vers de terres, ceux qui creusent le sol de leurs galeries, les cloportes, les mille pattes, les araignées, les nématodes et bien d’autres. J’y reviendrai plus en détail dans un prochain article. En attendant, je vous propose d’observer votre lombricomposteur, votre compost, votre sol à la recherche des animaux que je viens de vous présenter afin de mieux les apprivoiser dans votre quotidien.

A très bientôt et bon noël !

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D’autres Jardins Sol Vivant en France et au Québec

Dans mon article précédent je vous ai décrit l’évolution d’un jardin sol vivant dans un contexte bien spécifique, en l’occurrence sur un coteau argileux du Gers. Mais soyons clair, je ne suis pas entrain de vous donner une méthode qui marchera partout, méfiez vous toujours des recettes toutes faites et inadaptées à la majorités des situations…

Pour illustrer cela, voyons un peu d’autres jardins qui fonctionnent sur les principes expliqués dans le deuxième article de blog mais qui sont très différents de ce que je fais.

Je vous en propose ici trois, deux en France et un au Québec avec des liens vers des sites internet ou des ouvrages pour approfondir votre connaissance des ces endroit et de ceux qui les cultivent.

Le Jardin Naturel de Jean Marie Lespinasse en Gironde

Cela fait 14 ans déjà que Jean Marie Lespinasse, retraité de l’INRA de Bordeaux et grand spécialiste des pommiers, cultive son jardin dans une orientation qui rejoint totalement le jardinage sol vivant que je propose. Ici, nous sommes en sol très sableux et acide (du moins à l’origine), tout le contraire de chez moi ! Il a choisi de travailler sur des buttes, qu’il appelle ados, suivant une terminologie locale, soutenues avec des planches, aplanies sur le dessus et semées de trèfle nain dans les allées. Ces ados sont maintenus en permanence couvert d’un mulch de quelques centimètres de BRF, plantés de poquets de luzernes permanents réparties sur toute la surface cultivée. Les cultures potagères sont mélangées de sorte que tout y côtoie tout (j’exagère un peu, il respecte quand même quelques règles). Le seul travail du sol reçu par ces buttes est effectué à la fourchette pour la mise en place des plants ! Il fait aussi grand usage de lombricompost et de jus de composts pour ensemencer le jardins en microorganismes utiles.

Pour en savoir plus, voir son excellent ouvrage : « Le jardin naturel » aux éditions du Rouergue.

Le maraîchage expérimental de Pierre Besse en Haute Garonne

Pierre Besse est ingénieur agronome et maraîcher, expérimentateur dans l’âme, cela fait plus de 10 ans qu’il cultive ses parcelles dans la plaine alluviale de l’Ariège. Chaque année voit son lot d’expérimentations nouvelles. Il utilise entre autres des paillages divers et variés (résidus de culture, paille, BRF, cartons, plastique…), un travail du sol qui, s’il a lieu, est toujours très superficiel, et l’amendement régulier de certaines parcelles avec du BRF composté. Et depuis 2 ans il met en culture des andains de BRF entreposés là depuis une dizaine d’année et colonisés par les ronces. Il a fallu défricher avant la mise en place de pommes de terre dans un premier temps puis de diverses cultures maraîchères.

Il n’existe pas à ma connaissance d’ouvrages ou de site internet qui décrive le travail de Pierre. Vous pouvez toutefois visionner quelques photos de ses parcelles à cette adresse qui amène sur le diaporama qu’il a proposé aux participants du colloque BRF de Toulouse en juin 2010 :

http://colloquebrf.enfa.fr/diaporamas-brf/maraichage/Besse.pdf

Rangée de tomates plantée directement à travers un andain de résidus de cultures
Cultures maraîchères diverses récemment mises en place directement dans un andain de BRF qui évolue là depuis une dizaine d’années

 

Le jardin de Vivaces de Jacques Hébert, pionnier des BRF au Québec

S’il est un pionnier de l’utilisation de BRF, c’est bien Jacques Hébert. Depuis les années 80, il cultive une parcelle d’un peu plus d’un hectare consacrée à la culture de plant de vivaces d’ornement. Il a mis au point une façon bien à lui de cultiver sur butte. Tout d’abord, il prépare un « pré-compost », ou plutôt un terreau de BRF fabriqué par mise en tas de BRF mélangé à une proportion significative d’argile (25% en fin de processus). Le compostage dure un mois et la température est contrôlée de façon à rester en dessous des 40°C. Ensuite ce terreau est incorporé à des buttes et paillé avec du BRF frais. Les années qui suivent, la seule intervention sur le sol consiste à ramener du BRF frais là le paillage a disparu, c’est tout ! Il arrive ainsi à cultiver des buttes sans aucun autre apport pendant au moins 12 ans (âge des plus anciennes buttes) ! Et les résultats sont tout à fait spectaculaires puisqu’il arrive même à allonger la durée végétative de ses plantes, dont la vigueur est tout à fait remarquable, ce qui est appréciable dans une contrée froide comme le Québec.

Pour plus d’informations sur son travail, je vous invite à visiter son site internet : http://www.jardinsvivaces-livegardens.com/

Aperçu des buttes de Jacques avec un paillage de BRF jusque dans les allées.
coupe schématique d’une buttes façon Jacques Hébert. La partie grisée est celle où se trouve le « précompost ».

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Bien sûr, cet aperçu des jardins sol vivants, n’est qu’un échantillon de ce qui peut se faire. D’ailleurs, je vous invite à laisser un commentaire ci dessous pour faire part de vos expériences.

En attendant, pour nourrir l’imagination et découvrir d’autres façon de jardiner avec la vie du sol, voici quelques ouvrages :

« le guide du nouveau jardinage » de Dominique Soltner (Ed. Sciences et Techniques Agricoles) dans lequel il dévoile tout une myriade d’itinéraires cultures, techniques divers et astuces de jardinier qui permettent de cultiver « sans bêchage, ni fraisage, ni sarclage, ni binage », comme le dit le sous titre de l’ouvrage.

« Le génie du sol vivant » de Bernard Bertrand et Victor Renaud (Ed. Terran) où une partie des pratiques utilisées dans le jardin de la ferme de Terran est décrite en fin d’ouvrage (livreVI).

Et bien entendu « Le jardin naturel » de Jean Marie Lespinasse (Ed. du Rouergue) déjà évoqué précédemment !

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Un jardin sol vivant au cœur de la Gascogne

Histoire que vous me connaissiez un peu mieux, voici un petit historique du jardin de mes parents que nous cultivons depuis 2007 sur un coteau argileux du Gers. Et quand je dis argileux, c’est très très argileux,

septembre 2007 : Récolte symbolique de tomate sur l'embryon du potager actue

bien lourd, quoi ! Pendant des années ma mère s’est cassé le dos à bêcher cette terre pour préparer de quoi faire deux rangées de fèves, elle avait fini par laisser tomber. Puis j’ai découvert les BRF en 2004 et l’idée à fait son chemin et en janvier 2007 elle a épandu du BRF sur une petite parcelle de pelouse préalablement sarclée à la houe, c’est là que commence notre histoire :

En 2007, c’était vraiment pas ça, les tomates sont restées rachitiques et ont peu donné, le sol est resté compact, les carottes n’ont jamais levé et les radis sont restés minuscules, bref pas de quoi pavoiser… Quoique, certaines tomates apéritives étaient vraiment délicieuses, peu abondantes, certes, mais vraiment délicieuses ! Allez c’est déjà ça ! Bon, je vous l’accorde, il y a eu un soucis dès le départ, j’étais en voyage lorsque ma mère est allé chercher le BRF, du coup elle en a beaucoup trop mis (10cm !), sur un sol lourd comme le notre cela ne pardonne pas, surtout avec un printemps pluvieux comme celui de 2007. Et pourtant, malgré cette erreur, nous n’avons presque pas eu de mildiou même dans l’arrière saison alors que tous les voisins en étaient envahis… Tiens donc, il s’est quand même passé des choses intéressantes…


2008 : pendant l’hiver, sous les conseils d’Éléa, co-auteure du « Livre BRF », nous avons agrandit le potager en couvrant l’herbe de cartons et de foin. Et comme je n’avais pas assez de place pour mettre les tomates sur le potager de 2007, j’en ai planté quatre directement à travers ces cartons. Et là surprise, sans aucune fertilisation complémentaires, ces tomates buissonnantes se sont développées très rapidement et ont donné des récoltes tout à fait correctes. Alors on retient la leçon et on refait la même chose pour agrandir le potager en 2009.

mai 2008 : Les plants de tomates viennent d'être mis en place à travers cartons (non visibles) et paillage de foin. Cette parcelle révèlera d'agréables surprises...

2009 : Trois nouvelles planches de culture sont inaugurées avec BRF (1 à 2 cm directement sur l’herbe) des cartons et du foin (produit dans les zones « en friche » du jardin). Là encore, des résultats intéressants, mais l’hiver humide avait décomposé les cartons et il a fallu tout enlever et sarcler la potentille avant de mettre les tomates, les courgettes et les courges. Là encore, on retient la leçon, il n’est pas forcément pertinent de mettre les cartons trop tôt, février est largement suffisant !


Été 2009 : Le jardin commence à ressembler à un vrai potager, et cela, quasiment sans travail du sol !

Été 2009 : La planche de tomates et courgettes, à gauche, a été implanté sur un sol préparé dès le mois de janvier avec un paillage de BRF, cartons et foin posé directement sur l'herbe

2010 : Cette fois, ça y est, le potager est vraiment productif et nous permet même de faire des conserves de fèves d’abord, puis de tomates, nous sommes sur la bonne voie et les pratiques se sont diversifiées : mise en place couvert de type « biomax » en novembre sur une des planches : l’essai est plus que concluant, en 2011, c’est toutes les planches sans culture d’hiver qui auront droit à ce traitement. Une autre expérience est tout à fait remarquable : ma mère avait entassé en février des branches de laurière sur la pelouse pour que je les broie, je ne l’ai jamais fait… Du coup en avril elle a tout récupéré pour en faire des fagots d’allumage et des bûchettes et là surprise : le sol là dessous était souple et sombre. Pas d’hésitation, on y fait un nouveau potager, léger sarclage et paillage de foin ont suffit à produire les plus beaux plant de tomate et courgettes du jardin, bon là encore on retient la leçon, l’année prochaine, plus de cartons, mais des rameaux feuillés d’arbustes à feuilles persistantes : arbousiers, laurier noble, voire résineux (soyons fous, la nature nous réserve tellement de surprises !).

Avril 2010 : Implanté en novembre 2009 pour préparer les culture de l'été 2010, notre premier couvert est un franc succès tant du fait de son beaux développement que son action sur le sol !
Septembre 2010 : Voici la petite parcelle préparée involontairement avec des branches de laurière entassées entre février et avril... Joli pousse pour une terre ni travaillée ni fertilisée !

Et pour 2011, je me ferai un plaisir de partager avec vous nos expériences, et de découvrir ensemble comment améliorer encore et encore ces systèmes !

A bientôt

Gilles

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Le Jardinage Sol Vivant : Quelles Techniques ?

J’ai définit dans mon article précédent ce qui me paraît incompatible avec le jardinage « sol vivant », il est donc grand temps de vous parler des pratiques qui vont dans le sens de la formation d’un sol roche en humus, en bactéries, champignons et animaux divers et variés qui s’occupent de fertiliser, aérer, brasser, structurer… votre sol tant chéri ! La liste que je propose ici est certainement incomplète, mais ce sont les pratiques qui me semblent à ce jour les plus pertinentes : Les couverts végétaux, les paillages, les Bois Raméaux Fragmenté, les extraits végétaux, la création d’un environnement favorable.

Les couverts végétaux

Ne jamais laisser un sol nu, voici un mot d’ordre capital dans le jardinage « sol vivant » ! Alors le meilleur moyen c’est d’intercaler entre deux cultures un bon couvert végétal (alias engrais vert dans certains cas ou CIPAN pour Culture Intermédiaire Piège à Nitrates dans d’autres). En effet, aucun paillage n’est aussi efficace la présence d’une couverture végétale vivante ! La biomasse produite in situ, l’azote fixé par les Rhizobium des légumineuses, la structuration du sol, la libération de sucres et autres composés carbonés par les racines sont des alliés indispensables des organismes du sol !

Floraison de la vesce dans un couvert de type « biomax » composé de multiples espèces (avoine, fèverole, fénugrec, moutarde, radis fourrager…)

Les paillages

 

Là encore indispensables pour économiser les arrosages, mais aussi pour apporter de la matière organique au sol et de la nourriture à nos chères bactéries, champignons et animaux souterrains, les paillages sont très nombreux. Je ne cite ici que ceux qui peuvent être produit dans le jardin ou fabriqués à partir de déchets faciles d’accès : foin, feuilles mortes, cartons d’emballage, tontes de gazon, déchets de cuisines… Bien entendu les rayons des jardineries allongent largement cette liste !

Les Bois Raméaux fragmentés

Ben oui, quand même, à la base c’est là ma spécialité, fallait bien que j’en parle tôt ou tard ! Il s’agit tout simplement de branches broyés à utiliser comme paillage, mais aussi comme amendement pour améliorer le sol et nourrir des chaînes alimentaires très spécifiques (champignon spécialisés et leurs prédateurs). On enrichit ainsi la biodiversité du sol et complète les apports des couverts végétaux vivants et des paillages.

Jeunes fèves sous paillage de BRF
Le « purin » d’orties… Un jeu d’enfant !

Les extraits végétaux

Bien sûr les insectes et les maladies sont quand même là, il faut bien faire quelque chose, les extraits végétaux qui agissent plus sur la physiologie de la plante que sur les parasites et ravageurs me semblent être le meilleur

moyen, alors vive les« purins d’Orties et Compagnies » ! Et un pied de nez au passage à l’industrie agro-pharmaceutique qui décidément ne sert… à rien !

L’environnement

S’il est incontournable de chérir votre sol, vos efforts seront encore mieux récompensés si l’environnement est favorable aux auxiliaires de culture et à la mise en place d’un micro-climat favorable, cela passe par la présence d’arbres et arbustes champêtres (isolés ou sous formes de haies ou de bosquets), de mares, de rocailles…

Chez Jacques Hébert, pépiniériste et pionnier des BRF au Québec, l’amélioration de l’environnement avec mares et haies a autant d’importance que la gestion du sol !

Si vous restez sur votre faim, je vous rassure tout de suite, tous ces thèmes feront l’objet d’articles à venir, il y a tant et tant à écrire sur eux ! Par contre certains se disent déjà (si, si je vous entends penser très fort) : « Mais quel étourdit, il a oublié les composts ! ». Et bien non, je les ai pas oublié, je n’ai rien contre leur usage, mais si je n’en ai pas parlé ici c’est qu’il n’y aucune raison d’en faire une clé de voûte de notre système… A suivre !

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Un peu de théorie

Jardiner Sol Vivant : Qu’es aquo ?

Je pense qu’il est important de clarifier mon approche du jardinage. Je ne cherche pas à coller à telle ou telle école, ni à en créer une nouvelle. Je souhaite simplement vous proposer de découvrir ensemble comment mettre la vie du sol au centre de nos approche. Deux point techniques me semblent toutefois particulièrement importants pour être vraiment cohérent : le travail du sol et l’usage de certains pesticides.

Le travail du sol :

J’ai conscience qu’un non travail du sol absolu est une illusion en jardinage, il reste indispensable, ne serait-ce que pour réaliser des semis ou des plantations, ou encore pour récolter des légumes racines. Il faut donc faire la part des choses :

Je propose en effet de plus du tout travailler le sol avec des outils à socs : bonne nouvelle, vous pourrez gagner un peu d’argent en revendant votre motoculteur ! Et si vous n’en avez point, cette dépense est inutile. Évitez également les outils manuels de retournement du sol, comme la bêche.

Les outils à dents ont toutefois encore leur place, ne serait-ce que pour enfouir les semis à la volée ou incorporer du BRF au sol : les crocs à fumier restent très utiles, ainsi que le râteau pour des semis de petites graines. Mais il est clair que le travail reste extrêmement superficiel (3 ou 4 cm grand maximum !)

Que dire de la grelinette, cette outil si en vogue dans le jardinage bio actuel ? Je reconnais que je suis dans un sol très argileux où elle n’est pas bien adaptée, ce qui influence mon point de vue. Mais tout de même pour avoir utilisé cet outil, je trouve qu’il travaille le sol trop profondément et l’investissement (plus de 100€ tout de même !) ne me paraît pas justifié. En effet lorsqu’on sait qu’un vers de terre qui a la malchance de se balader proche de la surface (une quinzaine de centimètre) lorsque vous passez la grelinette n’a aucune chance de retrouver sa galerie et doit donc la reconstruire entièrement, vous comprenez que la perturbation pour la vie du sol est quand même intense, même s’il n’y a pas retournement…

Insecticides et Hélicides

Je me doute que la plupart d’entre vous sont des « bio » et que ce qui suit vous apparaîtra pour beaucoup comme une évidence. Mais il comme est tout fait possible d’avoir des pratiques très respectueuses sans pour autant être bio à 100%, je fais quelques précisions sur les pesticides : de tous les pesticides, les plus dangereux sont sans conteste les insecticides (y compris ceux qui furent longtemps autorisés en bio comme le pyrèthre ou la roténone !) qui tuent les insectes « ravageurs » mais aussi tous les autres, ainsi que les vers de terres et autres jardiniers de l’ombre, pour reprendre l’expression de Blaise Leclerc. Il est donc vital de sortir ces produits du potager sans quoi les chaînes alimentaires indispensables à un équilibre biologique ne pourront jamais se remettre en place. Il en va de même pour les anti-limaces (Hélicides), excepté l’orthophosphate de fer (commercialisé sous le nom de Ferramol), qui font des sacrés dégâts dans l’ensemble des chaînes de prédation de limaces !

Voilà, donc en conclusion tout jardinier qui travaille son sol le moins possible et qui n’applique ni insecticide, ni hélicide de synthèse, peut prétendre jardiner « sol vivant », même s’il n’est pas complètement bio ! Comme quoi, jardiner « Sol Vivant » va faire du vide dans de nombreuses cabanes de jardin !