Le titre de cet article pose un véritable défi, celui d’appliquer les méthodes du maraîchage sur sol vivant en contexte d’extrême aridité. Un article publié début 2021 sur ce blog par Mohamed Bouchentouf présentait déjà les réalisations de la ferme innovante « la clef des oasis » qu’il a créé à Timimoun, en plein Sahara algérien.
Il a réussi à organiser le colloqué présenté alors mais un an plus tard, pour des raison évidentes liées au contexte sanitaire, en mars 2022. J’ai eu l’honneur d’être un des intervenants et j’ai monté et mis en ligne l’enregistrement de la conférence, vous pouvez le visionner ici :
Cliquer sur l’image pour démarrer la vidéo (pour une raison inconnue la vidéo ne démarre pas à zéro, il faut mettre le curseur au début pour la démarrer du début…)
Il y est question de création de sol à partir de ressources locales du désert du Sahara telles que les sous produits du palmier dattier, les arbres locaux, les graminées géantes, les couverts végétaux… Je rassemble ici tout un ensemble de pistes pour créer du sol fertile et cultiver en économisant de l’eau en zone aride. La conférence dure jusqu’à 39’01 puis c’est la séance de questions.
J’en profite pour vous partager une petite observation faite dans le jardin du fort de Tinerkouk, à une soixantaine de kilomètre au nord de Timimoun où l’on voit un sol de couleur relativement sombre recouvert de turricules de vers de terre, comme quoi, même en plein Sahara c’est possible !
Turricules indiquant clairement la présence de vers de terre dans ce sol arideSous le houppier d’un grenadier la couleur du sol est même relativement sombre par rapport à la couleur du sable environnant
Cette observation a été faite le lendemain de ma conférence, je n’ai donc pas pu en tenir compte lors de celle ci, mais cela montre que même en partant d’un pur sol minéral composé de sable éoliens on peut avoir de l’activité biologique pourvu qu’il y ait de la matière organique (en l’occurence apportée par les arbres et arbustes du jardin, dattiers et grenadiers notamment) et de l’eau, en l’occurence issue de l’irrigation vu que les précipitation annuelles sont à peu près nulles dans ce secteur du Sahara.
Dans ma boutique, j’indique pour certaines plantes qu’elles sont plus adaptées aux sol calcaires (donc basiques) ou aux sol acides, il s’agit notamment du lupin, du sainfoin et de la luzerne. Mais j’ai cru comprendre que ces notions de pédologie ne coulent pas forcément de source pour tout le monde, je vous propose donc d’explorer un peu plus en détail ces notions.
Qu’est ce qu’un sol acide ou basique
Ces notions font référence au pH du sol, qui est une grandeur qui s’exprime sur une échelle de 0 à 14.
Plus le pH est bas, plus le sol est acide, plus il est haut, plus il est basique.
Un pH aux alentour de 6,5 – 7 indique un sol neutre.
Comment savoir si mon sol est acide ou calcaire
1. Observer la roche mère
En général, en milieu tempéré, les sols basiques correspondent aux sols calcaires, c’est à dire développés sur des roches tels que le calcaire, la dolomie, les marnes, les molasses calcaires… En milieu tropical on va aussi trouver des sols basiques associés à de fortes teneurs en sel, ce qui rend la mise en culture compliquée.
Les sols acides sont souvent dévéloppés sur des matériaux tels que le granit, les grès, les schistes, les sables…
Si le sol est développé sur un basalte, il est probablement neutre.
Cela dit cette approche reste très approximative, en effet, certains grès peuvent contenir du calcaire, ou au contraire, certains sols calcaire suffisament évolués peuvent avoir vu tout le calcaire des horizons de surface dissous et évacué par les eaux d’infiltration, ces horizons sont alors légèrement acides.
Et sur certaines roches mère (ou plutôt matériaux parentaux), comme des alluvions par exemple, ce n’est pas très évident car ces alluvions sont souvent un mélange de plusieurs types de roches amenés et déposés par les cours d’eaux, dont certaines sont acides et d’autres basiques
Sur calcaire les sols sont généralement basiques. (c) ShekuSheriff de Pixabay.com Sur schiste au contraire on observe des sols acides. (c) Stephan Geißer de Pixabay.com
2. Faire des test simples
Il existe aussi un test simple pour évaluer la présence ou non de calcaire, ce qui implique un sol basique : il suffit de verser quelques gouttes d’un acide (idéalement un acide fort comme l’acide chlorhydrique), si celui-ci se met à bouilloner, cela signifie qu’il y a présence de calcaire, présence d’autant plus importante que le bouillonnement est intense, et donc que le pH de votre sol est basique, probablement quelque part entre 7,5 et 9. Le sainfoin ou la luzerne seront alors tout à fait adaptés mais le lupin sera à proscrire.
Si au contraire, il n’y pas effervescence, le sol est non calcaire, donc d’un pH probablement inférieur à 7 (à moins d’être en présence d’un sol salé…), mais ne donne aucune information suplémentaire.
Si vous souhaitez un peu plus de précision, il y a aussi la possibilité de mesurer le pH, on trouve en jardinerie des bandelette pH permettant d’avoir une estimation de cette valeur, même la précision est modérée, cela est suffisant pour un jardinier.
Pour plus de précision, on peut aussi utiliser un pH mètre ou faire faire une analyse de sol. Mais cela n’est pas formécement très utilie pour le jardinier, par contre pour des maraîchers, l’analyse de terre est de toutes façons incontournable et mesure précisément le pH, souvent avec plusieurs procédés
3. Les plantes bioindicatrices
L’observation des végétaux spontanées est aussi une méthode relativement fiable. Certaines plantes sont des indicatrices de sols acides, par exemple la callune, le châtaignier, le chêne liège, le chêne tauzin, la fougère aigle, l’oxalis, la digitale pourpre… Alors que d’autres indiquent des sols basiques comme le cornouiller mâle, la viorne lantane, la clématite ou encore la coronille arbrisseau.
Attention cependant, pour ce faire, il faut identifier des végétaux sensibles au pH et la grande majorité des végétaux apprécient une gamme de pH plus ou moins larges autour de la neutralité et ne sont donc pas adaptés pour déterminer si notre sol est acide ou basique !
Comment savoir si un végétal est sensible au pH ? Le plus simple est d’ouvrir un livre comme la Flore Forestière Française de Rameaux et al. et regarder « les données autoécologique » d’une plante. En voici quelques exemples :
Prêle des champs. (c) Adege de Pixabay.com
Voici un exemple, celui de la prêle qu’une « légende rurale » associe aux sols acides.
En bas à droite de chaque fiche d’espèce dans le livre de la Flore Forestière Française, se trouve le petit schéma ci-contre qui décrit les exigences écologiques d’une espèce en fonction de l’humidité du sol en ordonnées (XX = très sec – xérophile, H = très humide – hydromorphe) et de son acidité en abcisse (AA = très acide, n = neutre, b = basique). On voit ici que la prêle apprécie les sols modérément humides à hydromorphe et basiques à légèrement acides. Ce n’est donc pas une plante biodindicatrice très intérssante pour ce qui nous préoccupe ici et certainement pas une plante indicatrice de terrains acides !
Issu de Rameaux et al.1989 Sous bois colonisé par la fougère aigle. (c) Albrecht Fietz de Pixabay.com Issu de Rameaux et al.1989
Bien qu’exceptionelement observée en terrain calcaire (écotype particulier de la régino de Châtillon sur Seine en Côte d’Or), la fougère aigle, si elle apprécie tout type d’humidité de sol est en revanche plus exigeante en terme de pH puisqu’elle préfère les sol de pH acide à très acide, elle est donc un bon indicateur dans ce qui nous intéresse ici.
Oxalis. (c) Etnatski de pixabay.com
L’oxalis, une plante souvent envahissante dans les jardins est surtout spécialisé dans les sols légèrement acides et moyennement humides, elle est donc une bonne plante bioindicatrice, aussi bien pour l’humidité du sol que pour son acidité.
Issu de Rameaux et al. 1989 Cornouiller mâle. (c) Goran Horvat de pixabay.com Issu de Rameaux et al. 1989
Le cornouiller (Cornus mas) aux fruits comestibles est au contraire un assez bon indicateur de terrains neutres à basique, même s’il peut occasionnellement être observé dans des terrains légèrement acides.
En revanche et contrairement à une autre idée très répandue, les sols sous résineux ne sont pas forcément acide. J’ai moi même mesuré lorsque j’étais étudiant des pH dans une forêt de pins d’Alep… normal, elle se developpait sur un terrain calcaire aux sols peu évolués. La plupart des résineux se développent sur une large gamme de pH et ne renseigne donc en rien sur le pH du sol. Une exception toutefois parmi les résineux les plus communs, le pin maritime (ou pin des Landes) qui, ,lui est en effet un bon indicateur de terrains acides.
Voilà je crois qu’avec tout cela vous tout pour savoir si votre sol est acide, neutre ou basique et vous pourrez choisir en toute connaissance de cause du lupin dans un sol neutre ou acide ou du sainfoin dans un sol basique. En ce qui concerne la luzerne, elle préfère les sols basiques mais peut s’implanter en sol acide (pH < 6,5), il faut alors choisir la variété inoculée et enrobée de carbonate de calcium.
Vue du désert de l’Atacama (Chili) après 4 ans de sécheresse.
Bon, je dois être fatigué, je ne suis jamais allé au Chili (même si ce pays ne manque certainement pas d’attraits), cette photo a été prise en Ardèche méridionale, dans la vallée de la Claysse, et l’état de ce sol n’est pas dû à une sécheresse mais à une crue historique. En effet le 13 septembre 2015 nous est tombé sur la tête un déluge comme on n’avait pas vu depuis Noé ! Enfin, bon, de mémoire d’ancien, lé dernière crue comparable date de 1951, à part que là on est monté encore plus haut (Noé c’était il y a 4289 ans, donc j’exagère peut être un peu). Toujours est-il que voici ce que j’ai découvert le 14 au matin (outre le fait que je n’avais plus d’internet jusqu’à ce matin…) :
La rivière encore en crue (visible au fond) et un champ quelque peu amoché par les flots torrentiels.
En gros 5 à 10 centimètre de terre « fertile » emportés qui révèle le niveau du dernier travail du sol réalisé (probablement le semis du blé en octobre 2014, semis effectué sur un sol humide, donc très sensible à la compation et à la formation de semelles d’outils). Un peu plus loin, on voit même les détails des manœuvres du tracteur lors de cette opération :
la semelle de semis mise à jour par les flots de la Claysse.
Les racines de la haie qui longe le champ sont à présent à l’air libre !
Les racine de la haie /ripisylve voisine mis à l’air.
Dans les vignobles, c’est le même topo, même si la terre sur le rang, sans doute mieux structurée et protégée par les ceps a mieux résisté :
érosion par la crue dans un vignoble.
Et la terre « fertile » on la retrouve ça et là, par exemple dans ce chemin creux, qu’on devra désormais considérer comme un chemin creux comblé :
Accumulation de terre dans un chemin creux.
D’ailleurs cette terre n’est pas perdue pour tout le monde, dans certains champ, elle s’est au contraire déposée, comme ici :
Accumulation de terre en bordure d’un champ plus en aval.
Mais alors la question se pose : est-ce que certaines terres ont mieux résisté que d’autres à l’érosion due à cette crue ? Voyons ce qu’il en est d’un champ encore en culture à cette période de l’année.
Champ de sorgho : pas mieux que la terre nue…
Bon, en fait, quand la terre est déstructurée, ça fait pas mieux lorsqu’elle est couverte que lorsqu’elle est nue… Voyons un peu plus loin, cette fois c’est un champ de tournesol envahi par l’ambroisie :
Champ de Tournesol envahi par l’ambroisie : encore beaucoup d’érosion même si le couvert dense a un peu protégé la terre.
Là c’est à peine mieux, certes, le couvert végétal un peu plus dense (merci l’ambroisie) a un peu protégé le sol mais l’érosion est quand même encore très visible.
Juste à côté, voici une friche qui s’est développée sur une zone de travaux effectués il y a 3 ans pour la construction de digues :
Érosion et dépôts de graviers dans la friche.
Là, dans les zones de terre nue, c’est toujours le même spectacle, sauf que quand même, dans les zones abritées par des touffes d’herbes, un peu de gravier s’est déposé à la fin de l’inondation, c’est toujours ça de gagné ; et dans les les zones enherbées de graminées, la terre semble avoir tenu.
Finissons ce petit tour par une prairie permanente :
Prairie permanente une semaine après avoir été noyée sous plus d’un mètre de flots torrentiels.
Là c’est plus encourageant, les plantes ne sont pas déchaussées, à première vue, pas de trace de d’érosion, tout semble avoir tenu, regardons d’un peu plus près.
Les turricules sont encore là !
Eh bien, les turricules de vers de terre qui tapissent la surface de cette prairie sont encore là, comme quoi lorsque le sol est vivant, même dans les quelques endroit où on a encore quelques centimètres carré de sol nu, ça a tenu malgré la violence de la crue ! Si vous doutiez de la résistance d’un sol vivant, voilà une belle illustration ! D’ailleurs, il me semble qu’autrefois les terres en bordure de cours d’eau étaient soit en forêt, soit en prairie, il y avait peut être une raison à cela…
Dans les commentaires de l’article « un potager sous les oliviers » que j’avais posté début novembre, Christian, un de mes lecteurs, avait évoqué dans un commentaire des cultures maraîchères sous des oliviers observées depuis une montgolfière dans la région de Marrakech, au pied du Haut Atlas. Il a cherché à en savoir plus, mais l’enquête s’est révélé difficile et il n’a pas réussi à obtenir de détails sur les techniques culturale de ces paysans marocains. Alors je propose juste ces fameuses photos, assez saisissante à mon sens avec ces cultures sous olivier au beau milieu d’un paysage semi-aride :
Et bien sûr si vous avez des infos sur ce type d’agroforesterie, je suis preneur. Je sais qu’il a un nombre significatif d’entre vous qui habite au Maghreb, alors votre savoir nous intéresse !
Cet article est écrit dans le cadre d’un carnaval d’articles organisé par le blog jardin de Jenny. Jenny souhaite recueillir l’avis d’un maximum de personnes sur leur plante, légume ou fleur fétiche ou sur leur recette de cuisine préférée. Lorsque les articles des internautes auront tous été rédigés vous pourrez retrouver un résumé sur le blog de jenny (avec un lien vers l’article).
Dans un jardin, il y les plantes que l’on cultive pour le ravissement des yeux, d’autres pour les celui des papilles et d’autres encore pour aider les deux premières catégories à pousser : il peut s’agir de plantes qui attirent sur elles ou au contraire éloignent certains ravageurs ou encore des plantes qui améliorent le sol. Etant un spécialiste et amoureux des sols vivants, j’ai choisit une plante parmi ces dernières.
Les plantes qui améliorent le sol sont utilisées comme couvert végétal ou engrais vert. Parmi celles-ci nombreuses sont celles qui appartiennent à la famille des légumineuses et au sein de cette vaste famille, je vous propose de découvrir ici le trèfle incarnat !
photo issue du site naturellementmail.free.fr
Qui est-il ?
Cette petite plante annuelle fait partie du genre Trifolium qui regroupe tous les trèfles. Il est originaire des pelouses méditerranéennes sèches (comme chez moi en Ardèche méridionale où on le voit régulièrement au printemps). Il se caractérise par une magnifique floraison printanière au rouge éclatant qui le fait surnommer par Joseph Pousset, agriculteur bio en Normandie et consultant de renom, « l’or rouge » ! Et il faut bien reconnaitre que ce surnom est tout à fait légitime à la vue d’un champ de cette plante en pleine floraison ! Toutefois, il peut arriver, comme c’est le cas dans les pelouses autour de chez moi que l’on rencontre des formes plus discrète à la floraison blanche et rose.
C’est une plante qui se sème en fin d’été, pas plus tard car sa plantule fragile risquerait de trépasser dès les premières gelées. Il fleurit entre mi-avril et mi-juin.
Pourquoi est-il intéressant ?
Tout d’abord, il appartient à la famille des légumineuses et à l’instar de tous ses frères et sœurs, il abrite dans ses racines des bactéries capables de se nourrir de l’azote de l’air, ce qui lui permet, après sa mort, d’enrichir le sol en cet élément si précieux, à condition bien sûr de laisser sur place ses parties aériennes !
Son puissant système racinaire, capable de se développer fortement dès la fin de l’hiver lui permet aussi d’aérer le sol en profondeur !
Ensuite il est parmi les trèfles un des rares à être annuel. En effet les trèfles plus communs en France (trèfle blanc, trèfle violet…) sont généralement vivaces, ce qui est très intéressant pour des cultures fourragères, mais beaucoup moins dans un couvert végétal qui ne peut occuper le sol que quelques mois dans l’année. Cela le rend donc beaucoup plus facile à détruire si l’on doit mettre le sol en culture au printemps. Si on peut attendre l’été, c’est encore plus simple puisqu’il meurt naturellement après la floraison.
A l’instar des autres trèfles, il est également très mellifère.
Est-ce uniquement une plante de couvert végétal ?
Non, bien sûr ! Autrefois il était couramment pâturé ou utilisé comme fourrage, mais son cycle annuel le rend moins productif que des trèfles ou autres légumineuses vivaces ou bisannuelles (luzernes, sainfoin, lotier…). De sorte que malgré ses intérêts nutritionnels, sa culture a été plus ou moins abandonnée. Elle a toutefois tendance à revenir actuellement grâce au nouvel engouement pour les couverts végétaux.
Et puis aussi, même s’il n’est pas très utilisé à cette fin, sa magnifique floraison pourrait lui offrir une place de choix dans les massifs d’annuelles de nos villes et de nos jardins !
Donc au final : couvert végétal fixateur d’azote, décompacteur du sol, mellifère et qui cède sa place naturellement au bout de huit à dix mois, plante de fourrage et de pâturage et potentiellement plante qui illumine les massifs d’ornement, c’est plutôt complet comme tableau ! Il lui manque juste d’être comestible pour nous, mais consolons nous, il aide les cultures suivantes à produire plus sur un sol en meilleure santé !
« La notion de propreté dans un jardin, c’est ce qu’il y a de pire pour le jardin… Parce que c’est aussi anti-biologique, ça n’a pas de sens en réalité. Donc je suis partit du fait que ces question là n’avaient pas à être introduites dans un mode de gestion écologique »
J’ai trouvé cette phrase magnifique sur le blog d’une de mes lectrices, inutile de préciser que j’adhère sans réserve à cette approche !
Et j’ai envie de développer un peu la réflexion proposée par Gilles Clément en l’appliquant au potager, ce qui est un peu différent du thème exploré dans la vidéo.
Visitons un peu la considération des plantes spontanées au jardin : elles sont considérées comme « mauvaises herbes », les espaces qu’elles envahissent sont « sales », les agriculteurs parlent même de « salissement » pour parler de l’enherbement d’un champ !
A l’opposé, une terre nue entre des rangées de plantes cultivées bien alignées et toutes identiques est considérée comme « propre », peu importe que cette terre soit compactée par les passages, les pluies et l’irrigation, qu’elles soit sensible à l’érosion, appauvrie en vie et en matière organiques…
Bien entendu, l’amalgame entre la tenue d’une maison et celle d’un jardin est immédiate, mais la rigueur requise dans une maison l’est-elle aussi au jardin ?
On comprendra aisément que si la crasse, le désordre et la poussière sont des nuisance visuelles et sanitaire à l’intérieur des maisons, il n’en est pas de même au jardin ou les plantes spontanées apportent de nombreux intérêts : fleurs, biodiversité, biomasse, couverture du sol, fixation d’énergie solaire et de carbone atmosphérique… Bien sûr il est indispensable de les contrôler afin qu’elles ne défavorisent pas nos culture, en particulier en été pour la concurrence en eau, mais cela ne justifie en rien d’appliquer au jardin la « propreté » requise pour une paillasse de laboratoire !
Bien sûr, j’imagine que la plupart d’entre vous sont au moins en partie libérés d’une telle vision, mais je vous invite à aller un peu plus loin : Pourquoi ce besoin d’un jardin « propre » si présent dans notre société ? Qu’est ce que cela fait à l’esprit, les « mauvaises herbes » ?
Je n’ai évidement pas les réponses définitives à ces questions, mais je vous invite simplement à faire l’expérience de relier cela à la rupture que connais notre monde désormais très urbain d’avec la nature profonde, sauvage. En d’autres termes, ce besoin de propreté, ne serait-il pas une expression de la peur de la nature. Et donc, si l’on suit le raisonnement de François Terrason (auteur du formidable essai « la peur de la nature »), la peur de nos propres émotions ?
Je vous laisse la réflexion à ce stade pour ce soir, dites moi comment cela vous parle dans les commentaires !
Lors du dernier WE de l’ascencion, je me suis rendu en Bretagne, plus précisément sur la presqu’île de Quiberon, pour le mariage d’un ami. Ce voyage depuis ma lointaine Ardèche a été l’occasion de m’émerveiller devant la ténacité des végétaux à se développer et à créer du sol dans un milieu aussi hostile que des dunes de sable pur battues par les vents et les embruns salés et piétinées par les pas des promeneurs. Je vous ai préparé une petite sélection de photos que je trouve assez émouvante de ces végétaux qui usent de toute leur ingéniosité pour s’adapter à de telles conditions de vie. Étant peu familier des végétaux de cette région les noms sont assez approximatifs, j’invite les bretons qui me lisent à préciser ces derniers.
Si la plage est à peu près dépourvue de vie végétale, dès qu’on arrive sur la dune, même dans les zones les plus piétinées et ventées, des graminées (chiendent?) à rhizome occupent le terrain:
Sur cette photo le sable est colonisé par un réseau de graminées à rhizomes bien visible ici: les pieds de ces graminées sont alignés le long des rhizomes.
Lorsqu’on gratte légèrement le sable, on apperçoit le rhizome, tige souterraine depuis laquelle partent les pieds des graminées. Ce mode de développement a pour avantage de créer des réserves souterraines imporantes dans un support qui en est dépourvu et de tresser un réseau qui tend à stabiliser le sable.
Dans zones moins piétinées, on voit ensuite se développer une végétation tout à fait singulière : une sorte de lande à plantes vivaces et légèrement ligneuses qui ne s’élève à guère plus de 10cm au dessus du sol. Cette « lande » est peuplée de toutes sortes de plantes à la floraison de toute beauté en cette fin du mois du mai : asteracées (épervière?), plantes succulentes aux fleurs blanches et mauves semblables à un liseron, rosacées (sorte de minuscule églantier) : ….….….
A ce stade, le sable, encore très pauvre en matières organiques est parcouru par les racines sur une épaisseur encore modeste. On peut pas encore vraiment parler de sol à ce stade.
Dans des zones plus stabilisées et sans doute un peu mieux abritées des mouvements de sable dus au vent, la colonisation est plus avec une véritable prairie dominée par les graminées.
Cette prairie encore relativement éparse composée majoritairement de graminées et d’ombellifères (ici des panicauts) s’est stabilisée à la faveur un grillage qui réduit les mouvements de sable dus au vent.
derrière ce même grillage, dans une zone totalement épargnée par le piétinement, la prairie se fait nettement plus dense.
A ce stade le sable est colonisé par un chevelu racinaire dense, on peut commencer à vraiment parler de sol.
Enfin, stade ultime de la pédogénèse sur les zones les plus exposées aux vents marins, des petits bosquet arbustifs de tamaris (j’ignore s’ils sont venus tout seuls ou s’ils ont été plantés) permettent à des petits îlots de végétation de s’exprimer.
Dans des zones plus abritées, une végétation pré-forestière s’intalle, comme ce lierre à la faveur d’une dépression abritée du vent et hors des sentiers battus par les promeneurs.
Enfin, même si leur présence n’est peut être pas naturelle, des forêts de cyprès majestueux s’élèvent sur la côte est de la presqu’île en abritant un sous bois peuplé majoriatirement, du moins en cette saison, d’ombellifères.
Voilà pour ces exemples de formation de sol, aussi appelée pédogenèse, et d’écosystème dans un milieu assez difficile. J’aime particulièrement ces situation dans lesquelles les différentes étapes de la succession écologique sont bien visible pour peu qu’on prenne le temps de l’observer. Cela illustre également le travail à accomplir lorsqu’on souhaite cultiver « sol vivant » sur un une terre préalblement maltraité et pauvre en activité biologique et matière organique! A méditer, l’observation de la nature est une des meilleures écoles qui soit!
J’avais déjà évoqué le lierre dans ce blog en répondant à un commentaire, un de mes plus fidèles lecteurs et contributeurs de ce blog n’a pas hésité à prendre sa plume (ou plutôt son clavier) pour nous parler de cette plante merveilleuse et si injustement mal aimée! Je laisse la parole à Jacques :
Je voudrai réhabiliter une plante trop souvent combattue et détruite, car considérée comme un parasite, au même titre que l’ortie et autres plantes compagnes .
Le lierre est un véritable écosystème à lui seul car il abrite et nourrit un nombre incalculable d’insectes et animaux et participe à l’équilibre de l’environnement.
Ce n’est pas un parasite car il se fixe à un support ( mur ou arbre) par des ventouses non absorbantes, contrairement au gui qui pénètre l’écorce des arbres pour se nourrir de leur sève.
Ses racines sont superficielles et ne concurrencent pas celles des arbres qui elles, vont chercher plus profondément leur nourriture.
Il fait un couvre sol très efficace car il empêche la pousse de l’herbe, des ronces, et autres plantes indésirables. Il vaut quand même mieux attendre, avant de le laisser s’installer au pieds des arbres que ceux-ci soient assez vigoureux. ( 4 à 5 ans)
Contrairement à une idée reçue, il n’étouffe pas l’arbre qui lui sert de support, car il grimpe verticalement, ne s’enroule pas, et n’empêche pas l’arbre de grossir.
A l’Automne, quand le lierre est en fleur, à une période ou les floraisons sont rares ? c’est une véritable « ruche » avec des milliers d’abeilles, de guêpes, syrphes, papillons etc…qui viennent se nourrir de nectar et de pollen à ses fleurs minuscules. L’hiver et au début du printemps il sert de garde-manger aux oiseaux, car si ses baies sont toxiques pour l’homme elles sont un véritable régal pour eux.
Son feuillage persistant permet d’abriter une multitude d’auxiliaires et nombres d’oiseaux y nichent. ( rouge-gorge , roitelet, troglodyte, fauvettes)
Depuis trois ans, je laisse le lierre coloniser un pommier pour observer son comportement et voir si un équilibre auxiliaire-prédateur peut se créer.
Le lierre a aussi certaines vertus thérapeutiques et sert en pharmacologie.
Ma Grand-Mère utilisait les feuilles de lierres macérées dans l’eau-de-vie pour soigner ses cors aux pieds. Cent grammes de feuilles bouillies quelques minutes dans deux litres d’eau font un bon liquide vaisselle.
Faites-lui une place dans votre jardin, vous n’en retirerez que des avantages !!!
Je viens tout juste de recevoir cet appel plutôt sympa émanent de la chaîne de télévision ARTE:
il s’agit ni plus ni moins que de participer à la deuxième campagne de cartographie des vers de vers de terre! Plus précisément, il s’agit de recenser les vers de terre de nos jardin, forêts, prairies… de les identifier grosso modo et d’envoyer des photos.
Pour ce faire, il suffit de se rendre sur le site des missions de printemps d’ARTE et de s’y inscrire, nous avons jusqu’au 31 mars pour partager nos observations.
La fiche de cette mission est disponible à cette adresse: http://missionsprintemps.arte.tv/system/pdf/01_fiche_protocole_VersdeterreOK.pdf
et la fiche de détermination est ici: http://missionsprintemps.arte.tv/system/pdf/fiche_determination_versdeterre.pdf
Je me suis déjà inscrit, j’espère pouvoir y participer, mais pour cela, il faudrait que le ciel se décide quand même à humidifier notre terre sud-ardéchoise, c’est pas gagné…
Je vous invite bien entendu à faire de même et à partager vos observations aussi ici, dans les commentaires ci dessous! Et là, bien sûr, pas de limite de date pour les poster!
Alors bonne mission vers de terre!
Je vous propose aujourd’hui de vous partager une observation faite dans mon jardin sud-ardéchois sur une planche semée de pois gourmand et céréales (orge et triticale, comme tuteurs).
Vue générale de la planches de pois gourmands tells qu’elle se présentait le 13 janvier
Et en regardant de près le sol, voilà ce qu’il apparaît (cliquer sur l’image pour l’agrandir) :
La partie gauche est l’inter-rang dont j’ai dégagé le paillage pour la photo et la partie gauche est un rang de pois, à un endroit où ceux-ci ne sont pas sortis (Endroit choisi pour la clarté de la photo, mais c’est pareil partout ailleurs).
Il est flagrant que l’état de surface de l’inter-rang est de bien meilleure qualité que celui du rang. Quelles sont les différences de traitement entre les deux zones?
– L’inter-rang a été juste sarclé à la binette (travail du sol sur 1 ou 2 cm à peine) puis légèrement paillé avec les résidus du sarclage ;
– Le rang a été sarclé, puis j’y ai ouvert un sillon au transplantoir, réalisé le semis et enfin refermé le sillon et tassé avec le pied.
C’est pas bien violent comme travail et pourtant la surface apparaît aujourd’hui fermée, sans porosité et se voit coloniser par les algues vertes (pas les mêmes que celles des plages bretonnes, bien entendu 😉 !)…*
J’avais l’habitude des terres gasconnes bien argileuses et abritant des myriades de vers de terre et là ces derniers avaient de toute façon tôt fait de restructurer les légères perturbations dues au semis, mais ici, sur les sols sableux des gréseux du Sud-Ardèche, ça ne marche pas pareil… J’ai l’impression que le sol n’a pas aimé être tassé puis laissé tel quel. Alors, je retiens la leçons, sur un tel terrain, il est indispensable de pailler le moindre centimètre carré, fût-ce avec un paillage très léger ! Bon ça n’empêche pas les pois de pousser, mais quand même ça ne me plaît pas !
Avez vous des observation similaire ou contradictoires à nous partager? Alors rendez vous dans les commentaires ci-dessous!