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I PREAMBULE

2020 est l’année de la trogne. Surnommée « le pétrole des campagnes », « baril de pétrole », on comprend que son rôle a été important jusqu’à l’arrivée des énergies fossiles, fin du 19° siècle.

Son aire géographique est mondiale ; on en trouve de partout ; et à toutes les époques : des trognes fossilisées de plus de 3000 ans ont été découvertes en Angleterre.

Parfois nommée arbre têtard, son aspect se retrouve dans le mot « trogne », pour un visage épanoui, buriné, aux traits saillants. C’est dire sa popularité. Popularité bien affaiblie jusqu’à la fin des années 90, jusqu’à son retour en grâce la faveur à la fois de la crise énergétique et climatique et la popularité du BRF et des plaquettes de chauffage.

II DEFINITION

LA TROGNE : c’est un feuillu qui est conduit à mi hauteur, afin d’obtenir, par des coupes régulières de la biomasse : feuilles, bois ; sans couper le tronc. On parle de taillis suspendus.

Le spécialiste : D Mansion. Son expérience est reconnue au niveau européen. Et ses aquarelles de trognes sont magnifiques.

La trogne, un art ?

Nous verrons plus loin que l’art s’est emparé de ce thème depuis longtemps.

Mais trogner un arbre s’apparente à de la sculpture ! On ressent une grande satisfaction à observer l’arbre, imaginer comment il doit être « sculpté » ; il faut continuellement combiner les opérations pour arriver à concilier impératifs biologiques, beauté des coupes et efficacité du geste. Tout cela dans la plus grande sécurité.

Ensuite en prenant du recul, on peut observer le résultat qui n’est jamais répétitif : il y a bien une créativité issue de l’operateur mais aussi de l’arbre !!! Voir ci-dessus « l’insecte vous regardant » !

III EXEMPLE DE CREATION D’UNE TROGNE

Créaton d’une trogne à partir d’un baliveau, illustration issue de Mansion, D. « La trogne, l’arbre au mille usages », Ouest France 2014

IV HISTORIQUE DE LA TROGNE

Les premiers à avoir créé des trognes sont les animaux : castor, chevreuil cerfs etc. Les tempêtes, la foudre, la neige sont aussi à l’origine de trognes. L’homme, en observant la nature, en a saisi l’intérêt.

Des preuves de trognes remontent à – 3400 ans en Grande-Bretagne.

Des trognes vivantes de 1000 ans et plus, sont présentes en Angleterre, en France en Grèce etc.

Age d’or : jusqu’en 1960. L’arbre têtard, a des vocations multiples : « arbre fourrage », fagots pour le boulanger et le chauffage, bois d’œuvre pour les charpentiers, bois d’œuvre pour la marine…

Jusqu’au XIXe siècle, il est un élément essentiel de l’économie d’autosubsistance des campagnes européennes.

L’arbre têtard sert aussi de repères culturels et cultuels : lieu de rencontre religieuse, de rencontres festives, jeux d’enfants, mythes etc. sans oublier le rôle de bornes de limites entre les différentes parcelles.

Des arbres têtards véritables ou factices ont servi de postes d’observation pendant la guerre 14-18 dans les tranchées !

Le remembrement des années 60, la fin de la sériciculture (ver à soie), ainsi que la mécanisation de l’agriculture, les font quasi disparaitre.

V LA TROGNE EN PRATIQUE

LA TAILLE : attention DANGER

La coupe à hauteur des yeux ou en hauteur est dangereuse ! Choisir le bon outil, et le bon échafaudage !!!

Quand ? : Automne, hiver ET printemps-été (fourrage, vers à soie).

Donc, selon les lieux, les besoins, les essences d’arbres, la trogne peut se conduire à tout moment dans l’année.

Pour ma part, j’ai testé des trognes de frêne en avril, mai, juin, juillet, août, septembre etc.

Les repousses ont été dynamiques dans tous les cas.

Périodicité :    1 an 2 ans : fourrage et ensilage, vannerie, boutures

                        3 à 5 ans : fourrage, piquets, buches moyennes

                        5 à 15-20 ans : bois d’œuvre, chauffage

ATTENTION : jeunes sujets = taille plus fréquente.

Cas des vieilles trognes : attention aux chênes : tailler progressivement, sur x années + tire sève conservé.

Avec les années, les trognes se creusent : l’arbre est le seul être vivant à mourir de l’intérieur.

Les effets de la trogne :

                        Bourrelet de recouvrement qui se forme.

                        Bourgeons dormants qui se réveillent et des racines nouvelles apparaissent.

                        Radicelles plus nombreuses.

                        Augmente la longévité de l’arbre : il devient plus résistant aux  maladies : maladies des ormeaux, des frênes par exemple.

LES ETAPES D’UNE TAILLE EN TROGNE

1° : le contexte : murier blanc âgé de 100 ans environ, abandonné pendant 15 ans. Sans trognage, il risque de mourir par effondrement sous le poids de la neige par exemple. Saison : hiver 2017.
2°: la taille : attention danger !!! Les travaux sur échelle sont dangereux, à éviter et interdits par le code du travail ! J’ai acheté depuis une tronçonneuse sur perche, moins dangereuse.
A noter : coupes franches, inclinées pour éviter la stagnation de l’eau de pluie. Ne pas couvrir de mastic = nid à parasites. En zone très chaude on peut protéger la coupe le premier été, par une motte de terre, qui disparaitra naturellement à l’automne.
3 : la taille est finie. Noter la coupe d’une partie du tronc qui avait été endommagée. Les branches sont : coupées en buches pour les plus grosses, les autres sont recyclées sur place au pied du talus à droite de la photo, sous forme de haie sèche, afin de le protéger contre l’érosion provoquée par le passage du troupeau de moutons.
4° : le même arbre à la fin du printemps suivant, en 2018. Noter la vigueur des rejets ! L’ancêtre est sauvé. Il sera taillé à nouveau durant l’hiver 2021 ou 2022. Cette fois le bois de  taille sera transformé en BRF. Mes grands parents, sériciculteurs, (élevage du ver à soie), cueillaient les feuilles à cette époque de l’année. Et le murier était trogné en fin d’été, tous les 2 ans, tous les ans s’il était vigoureux.
Ils confectionnaient des fagots avec ces jeunes branches.
Astuce : ils trognaient un arbre sur deux ou ½ murier par moitié, pour avoir de la production toujours disponible.

VI LA TROGNE AUJOURD’HUI.

-UNE RENAISSANCE ?

2006 : la relance : 1° colloque européen de la trogne

Création de l’AFAF (Association Française Agroforesterie) en France : en 2007.

Aujourd’hui, de nombreuses formations prodiguées sur tout le territoire, laissent à penser que sa survie et son développement sont assurés. Il en est de même en Europe. (Congrès de la trogne au Portugal, en Angleterre…)

-LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA TROGNE DANS L’AGROECOLOGIE

-les données à connaitre :

-AGROECOLOGIE :

Approche large : c’est « l’écologie des systèmes alimentaires »... (FRANCIS)

Approche concrète : on cultive AVEC le sol (et son environnement : haies, arbres…) vs sol SUPPORT de l’agriculture conventionnelle.

Le sol est un mileuVIVANT.

Donc, le sol respire et mange : de la matière organique.

La trogne va la lui en fournir de manière illimitée, sans transport et quasi gratuitement.

-L’AGROFORESTERIE : L’agroforesterie désigne les pratiques, nouvelles ou historiques, associant arbres, cultures et/ou animaux sur une même parcelle agricole, en bordure ou en plein champ. (AFAF).

-Gérer l’arbre, donc la trogne, dans un contexte d’agroforesterie :

Un sol vivant intéresse tous les types d’agriculture : jardin, maraîchage, céréales, fruitiers, vignes, élevages, grandes cultures … La trogne est une source majeure de matière organique proche.

La nourriture primordiale du sol vivant est le BRF : Bois Raméal Fragmenté.

Ce sont des rameaux et des branches qui sont broyés. La trogne est ainsi une source indéfiniment renouvelable de BRF !

Le BRF au sol, devient le siège d’une intense vie biologique, source d’azote pour le sol.

L’arbre têtard peut aussi structurer les haies. Dans ce cas le BRF proviendra à la fois de la haie et des arbres. (Voir mon prochain article sur les haies).

La trogne peut aussi être implantée en plein champ : agroforesterie intra-parcellaire.

Là aussi le BRF sera disponible sur place.

Tout le monde se souvient des pêchers de vigne !

L’agroforesterie nécessite quelques précautions : bien gérer l’enracinement, anticiper les largeurs des machines, choisir une densité et les espèces d’arbres adaptées…                     

Fin de la partie 1, la suite très prochainement…

13 Responses to L’art de la trogne par Alain Bremond (partie 1)

  1. hélène Deloizon dit :

    Aussi plein de trucs disponibles intéressants sur les trognes sur la chaîne youtube « vers de terre production »

    • robert erre dit :

      je confirme …La Vie est Belle

      • robert erre dit :

        On voit des trognes sans tire jus …au départ … c’est mieux dans laisser , cela doit ètre dit là ou je n’ai pas encore lu …
        mais je voulais le préciser …!
        Egalement  » interdit  » d’intervenir en ces jours (mi-mai) ou les animaux ont élus domicile et fait Voeux de bon et loyaux service envers leurs promises . ..ça baise quoi ,sans contraceptifs …inconscients . Nids de ta Mère !

        • robert erre dit :

           » –Cas des vieilles trognes : attention aux chênes : tailler progressivement, sur x années + tire sève conservé. » méa – culpa ..

          • Gilles Domenech dit :

            Y aurait-il une allusion ce cher Hervé Coves 😉 !
            Le thème des tire sève est assez controversé, j’ai déjà entendu certains spécialistes comme Dominique Mansion ou Alain Canet être très réservés sur leur usage. Dans le cas du murier d’Alain que l’on voit ici en tous cas l’absence de tire sève ne semble pas avoir affecté la reprise de l’arbre.
            Pour des vieilles trognes de chênes abandonnées cela peut en effet être justifié.

  2. très intéressant, il y a peu d’année j’avais lu dans la campagne de Saint-Malo que la taille têtard était obligatoire. mon voisin en Ardèche utilise cette technique pour alimenter ses chèvres et moi je vais receper mes chênes qui n’ont plus vu le coiffeur depuis des décennies mais le travail avec échelle est dangereux, merci de le rappeler

  3. PICCHETTI ANDREA dit :

    bonjour votre article est très interessanr j’ai un brugnonoier de 10ans qui a toujours la cloque chaque année je serais désolée de l’aracher peut t-on le faire en trognon? SVP , MERCI

  4. Eveline KIEVITS dit :

    Chouette article, vraiment fouillé et intéressant … chez nous en Belgique, dans les plaines de l’Escaut les trognes sont appelées « chokes » et sont conduites de la même façon, véritable réservoir de bois et de biodiversité !!! On en recrée un peu partout, j’en ai observé près de Mettet et en Brabant Wallon, ouf ! on retrouve doucettement de vieilles techniques qui ont fait leurs preuves !
    J’en ai même une dans mon jardin : j’ai replanté un petit Saule que je taille régulièrement en « boule », il repousse chaque printemps et me donne beaucoup de petits rameaux que je taille pour en faire du « mulch », bien utile pas ces temps de sécheresse.

  5. Silvia dit :

    Bonjour, trogner un arbre permet il de limiter l’expansion de son système racinaire ou au contraire va t’il l’encourager ? J’ai un frêne proche d’une canalisation. Merci.

    • Gilles Domenech dit :

      De ce que je crois comprendre de la physiologie de l’arbre, la réduction aérienne s’accompagne en effet d’une réduction racinaire, donc en effet le trognage de votre frêne pourrait être une solution à votre problème, surtout que les frênent supportent très bien la taille en trogne. !

  6. Andréas dit :

    J’ai été maraîcher à la ferme de Refaire dans le Gers (32) et j’ai eu l’occasion de participer à une conférence sur la trogne de Dominique Mansion organiser par Arbre et Paysage 32 l’année dernière, très intéressant!

    En tous cas, merci pour vos articles qui synthétise très bien le sujet de la trogne!

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