Catégories
Jardinons

L’ambroisie, une plante à éradiquer, vraiment ?

Depuis le mois de mai, je cultive avec ma compagne un jardin de 200m2 sur la commune de Chandolas en Ardèche méridionale, sur les rives du Chassezac, principal affluent de l’Ardèche. C’est un terrain sableux pauvre en activité biologique et en matières organiques, autrement dit, un terrain très intéressant pour expérimenter des pratiques visant à cultiver sur un sol vivant ! Comme toujours il est très instructif d’observer les plantes spontanées sur la parcelle, or ici, la principale d’entre elles est, et de loin, la terrible ambroisie (Ambrosia artemisiifolia L., voir photo ci-dessous).



Pourquoi terrible ?

Tout d’abord elle fait partie de ces plantes exotiques très bien adaptées aux conditions qu’elles trouvent chez nous, les plantes dites « invasives », comme le buddléia, l’ailante, la renouée du Japon et bien d’autres. Ces plantes posent problème en ce sens qu’elle prennent la place des plantes et modifient profondément les écosytèmes, de sorte que de nombreuses espèces végétales et animales se retrouvent peu à peu exclues de leur biotope naturel. Sur ce thème, je vous recommande au passage l’ouvrage délicieusement politiquement incorrect de Gilles Clément « Eloge des vagabondes ».
L’ambroisie (à laquelle Gilles Clément consacre bien entendu un chapitre) est originaire des déserts d’Amérique du Nord et s’implante sur la plupart des sols mis à nus et déstructurés par des travaux d’aménagement ou des pratiques agricoles.

Ensuite son pollen est fortement allergène, d’où les campagnes menées pour l’éradiquer. Voir par exemple le site ambroisie info pour plus d’informations.

Et enfin, terrible par le diagnostic qu’elle nous permet de réaliser, voici ce que Gérard Ducerf en dit dans son encyclopédie des plantes bio-indicatrices :

« l’ambroisie, plante annuelle, pousse naturellement dans les zones désertiques. Sa présence permet de comprendre les modifications du sol cultivé ou modelé par des pratiques humaines. La germination de la graine d’ambroisie est due à la perte d’humus, à la déstructuration des argiles par les intrants chimiques, qui provoque la perte de cohésion des sols réduits en poussière. L’ambroisie nous dit : « Vous fabriquez un désert artificiel » ».

Très intéressant, ma foi ! Cela signifie que nous sommes sur un sol en très mauvais état, cela me plaît bien finalement. Mais alors se pose la question : que faire avec cette plante embarrassante : d’un côté, nous sommes tenu de faire ce que nous pouvons pour empêcher sa prolifération (allez on y croit !), d’un autre, je suis toujours aussi peu enclin à faire du jardin propre où la nature ne doit pas avoir sa place. Or vu le contexte, laisser de la place à la nature, c’est laisser une place à l’ambroisie.

Et si on utilisait l’ambroisie à notre propre avantage ?

J’avoue qu’en arrivant sur ce terrain, je n’avais jamais vu cette plante, même si j’en connaissais le nom depuis des nombreuses années. Je ne me suis donc pas méfié… Et lui ai trouvé plein d’attraits : tout d’abord sa vigueur végétative nous permet d’avoir en permanence tout plein de biomasse à faucher pour pailler le jardin, ensuite sa tige ligneuse en fin de cycle me semble très intéressante pour réamorcer l’enrichissement en matières organiques stables un sol qui en est fort peu pourvu !

Et en plus, il s’agit d’une annuelle, donc d’une plante assez facile à contrôler par simple sarclage : pas de rhizome ou pivot vivace résistant au désherbage manuel.

Finalement, je ne suis pas si traumatisé d’être envahi par une si merveilleuse mauvaise herbe…

Voici donc ma proposition pour ceux qui, comme moi, doivent faire face à cette plante :

Au lieu de chercher à l’arracher systématiquement, vous pouvez vous contenter de la faucher avant floraison, afin d’éviter le problème du pollen allergène, et de laisser la biomasse au sol pour que celle-ci participe à l’amélioration du sol. Peut être que d’année en année, le sol s’améliorera et que la plante disparaîtra d’elle même, comme dans les prairies voisines où elle est totalement absente… Si c’est votre potager qui est envahi, c’est formidable, vous avez un couvert végétal d’été tout trouvé, même pas besoin de le semer !

Le produit de la fauche peut être aussi utilisé exporté comme paillage, mais dans ce cas, on ne permet pas le retour de matière organique au sol qui pourrait permettre à moyen terme la disparition de la plante si redoutée.

Une fois fauchée, la biomasse laissée au sol permet d’améliorer celui-ci: cela incitera-t-il l’ambroisie à déménager de cette parcelle? réponse dans quelques années!
Catégories
Jardiniers-reporters Observons

Le lierre: un trésor méconnu par Jacques Subra

J’avais déjà évoqué le lierre dans ce blog en répondant à un commentaire, un de mes plus fidèles lecteurs et contributeurs de ce blog n’a pas hésité à prendre sa plume (ou plutôt son clavier) pour nous parler de cette plante merveilleuse et si injustement mal aimée! Je laisse la parole à Jacques :

Je voudrai réhabiliter une plante trop souvent combattue et détruite, car considérée comme un parasite, au même titre que l’ortie et autres plantes compagnes .

Le lierre est un véritable écosystème à lui seul car il abrite et nourrit un nombre incalculable d’insectes et animaux et participe à l’équilibre de l’environnement.

Ce n’est pas un parasite car il se fixe à un support ( mur ou arbre) par des ventouses non absorbantes, contrairement au gui qui pénètre l’écorce des arbres pour se nourrir de leur sève.

Ses racines sont superficielles et ne concurrencent pas celles des arbres qui elles, vont chercher plus profondément leur nourriture.

Il fait un couvre sol très efficace car il empêche la pousse de l’herbe, des ronces, et autres plantes indésirables. Il vaut quand même mieux attendre, avant de le laisser s’installer au pieds des arbres que ceux-ci soient assez vigoureux. ( 4 à 5 ans)

Contrairement à une idée reçue, il n’étouffe pas l’arbre qui lui sert de support, car il grimpe verticalement, ne s’enroule pas, et n’empêche pas l’arbre de grossir.

A l’Automne, quand le lierre est en fleur, à une période ou les floraisons sont rares ? c’est une véritable « ruche » avec des milliers d’abeilles, de guêpes, syrphes, papillons etc…qui viennent se nourrir de nectar et de pollen à ses fleurs minuscules. L’hiver et au début du printemps il sert de garde-manger aux oiseaux, car si ses baies sont toxiques pour l’homme elles sont un véritable régal pour eux.

Son feuillage persistant permet d’abriter une multitude d’auxiliaires et nombres d’oiseaux y nichent. ( rouge-gorge , roitelet, troglodyte, fauvettes)

Depuis trois ans, je laisse le lierre coloniser un pommier pour observer son comportement et voir si un équilibre auxiliaire-prédateur peut se créer.

Le lierre a aussi certaines vertus thérapeutiques et sert en pharmacologie.

Ma Grand-Mère utilisait les feuilles de lierres macérées dans l’eau-de-vie pour soigner ses cors aux pieds. Cent grammes de feuilles bouillies quelques minutes dans deux litres d’eau font un bon liquide vaisselle.

Faites-lui une place dans votre jardin, vous n’en retirerez que des avantages !!!

Catégories
Jardinons

Le Pois fourrager : une plante à découvrir

Même si vous ne connaissez pas encore les pois fourragers, j’imagine que tous ceux d’entre vous qui ont un potager ont déjà cultivé des pois sous diverses formes qui sont toutes issues de l’espèce botanique Pisum sativum : petits pois nains, petits pois grimpant, pois gourmand (ou mangetout) et je ne parle même pas du pois chiche ou du pois carré qui n’appartiennent pas au genre botanique Pisum.
Les céréaliers cultivent également les pois fourragers qui servent d’aliment pour bétail soit en tant que graine de pois sec (pois protéagineux), soit en tant que plante entière. C’est donc cette forme de l’espèce Pisum sativum que je vous propose de découvrir ici.

J’avais découvert cette plante fin 2010 quand mon collègue et fournisseur de graines de couverts végétaux, Yann Labuche de Terre d’Humus, m’en a proposé pour les intégrer à mes couverts hivernaux, ce qui s’est révélé être une réussite, ils ont bien poussé et produit une jolie biomasse début mai. J’ai appris, alors que ces pois était en train de pousser, que leurs fruits étaient comestibles et aussi bon que des petits pois, j’ai vérifié, c’est vrai !

Cette année la violence des gelées aussi bien en Ardèche que dans le Gers ont détruit beaucoup de couverts et cultures d’hiver, mais pas les pois fourragers qui ont vaillamment résisté là où les autres pois ont gelé ! Une raison de plus de les adopter.
Non content d’être rustique au froid, ils s’adaptent à des terrains très variés, c’est pour le moment la seule légumineuse que j’ai réussi à tous les coups et dans des contextes très différents : coteaux argileux du Gers, sol sablo-argileux sur grès et sol sablo-limoneux sur granit en Ardèche. A chaque fois en culture d’hiver semée en novembre. Ni le très sec du printemps 2011, ni le très froid de l’hiver 2012 ne semblent l’avoir gêné! Dans toutes les situations la biomasse produite est remarquable avec des plantes de plus de 60 cm de haut qui couvrent densément le sol.

En plus ils sont très productifs et ils sont comestibles, non seulement pour leurs fruits, mais aussi pour leurs pousses qui ont un goût… de pois ! C’est la saison de les déguster !
Le seul truc que je maîtrise pas encore c’est leur tuteurage: l’an dernier, ils était incorporés à un couverts de phacélie et de féverole et cela les avait correctement maintenus debout. Cette année j’avais choisi de la mélanger à une céréale (orge ou avoine suivant les parcelles), mais leur développement spectaculaire suite aux pluies d’avril a rendu l’opération inefficace, surtout en Ardèche, mais aussi dans le Gers où ils ont en partie versé suite à un coup de vent.

Voici quelques photos pour vous familiariser avec cette plante

Le couvert de moutarde-pois-orge chez mes parents qui est devenu une culture de pois plus ou moins tuteurée par l’orge suite à la destruction quasi-totale de la moutarde par le gel de février
Fleurs de pois fourragers qui donneront dans deux ou trois semaines des fruits délicieux
Et en attendant les fruits, nous nous régalons déjà de ces pousses, sorte de gros bourgeons d’où sortira un rameaux feuillé et des fleurs. Je remarque que ces pousses sont beaucoup plus abondantes sur les pois fourragers que sur les petits pois.

Donc voilà, j’avais déjà adopté cette plante, mais là vraiment je commence à la considérer comme incontournable. Bien entendu, je vous recommande vivement pour l’automne prochain (ou la fin de l’hiver en climat froid), de réserver une place pour les pois fourragers.

Pour vous fournir en cette plante, vous trouverez dans ma boutique en 250 et 500 g les variété Arkta et Assas.

Catégories
Jardinons Un peu de théorie

En symbiose avec son potager

Oui, c’est le titre d’un livret électronique collectif qui vient d’être finalisé. Il est à l’initiative de Loïc du blog Mon potager en carré et a été co-écrit par cinq blogueurs spécialisés dans le domaine du jardinage. Parmi eux certains sont familier des lecteurs de ce blog :  Loïc, bien sûr, mais aussi Jacques du blog « le jardin bio de Jacques » et moi même ;-).
Ce livret propose aussi des textes de Christian du blog « Conseil jardin », de Fab du blog « Un coin de jardin » et de Samuel du blog « Champignons comestibles ».

Vous pouvez le télécharger gratuitement en cliquant sur le lien suivant:
https://jardinonssolvivant.fr/WordPress/wp-content/uploads/2012/04/En-symbiose-avec-son-potager.pdf

Et pour vous donner l’eau à la bouche, voici l’introduction de « En symbiose avec son potager » :

Ce livret électronique vous propose de découvrir le jardinage sous un angle nouveau, un angle qui met la vie au centre des réflexions et des pratiques. Qu’il s’agisse de la vie dans le sol ou la vie dans et autour du jardin : végétaux, oiseaux, mammifères, insectes, animaux du sol, champignons, bactéries, ou encore la vie, plus particulièrement la qualité de vie et l’autonomie des jardiniers et de leurs proches.
En symbiose disons-nous? Le mot peut sembler un peu fort, pourtant, les approches proposées dans ce livret proposent un regard résolument nouveau sur le travail du sol, les herbes spontanées dites mauvaises, la biodiversité du jardin, les champignons. Un regard qui s’éloigne de plus en plus de celui des planches labourées, affinées, qui restent nues sous le soleil de l’été et qui se tassent sous l’effet d’une irrigation souvent excessive, qui s’éloigne aussi de plus en plus de la pelouse tondue à ras deux ou trois fois par mois et qui s’éloigne aussi et surtout de la peur du vivant et de la nature!
Les auteurs de ces textes sont tous des blogueurs qui partagent avec leurs lecteurs leurs approches, réflexions, expériences… Notre passion pour la vie sous toutes ses formes ne signifie pas forcément que nous partageons tous les mêmes approchent, mais il est intéressant de percevoir qu’au-delà de nos petites contradiction, nous regardons tous plus ou moins dans la même direction : un jardin vivant, productif, esthétique.
C’est ainsi que Gilles vous fera découvrir le monde fascinant de la vie des sols, son fonctionnement et les pratiques qui permettent d’en tirer le meilleur. Puis c’est Loïc qui vous fera regarder d’un œil nouveau la biodiversité de votre jardin depuis les micro-organismes jusqu’aux mammifères en passant par les végétaux, les champignons, les oiseaux, les insectes… Jacques vous partagera alors l’essentiel de formidable expérience de plus de 30 ans en tant que jardinier et fils d’agriculteur du piémont Pyrénéen. Christian, quant à lui, vous proposera de vous pencher avec sensibilité sur l’esthétique de votre jardin tant potager qu’ornemental. Fabien vous proposera de réfléchir votre jardin, en termes d’organisation et de pratiques culturales, comme une voie vers l’autonomie alimentaire. Enfin, avec Samuel, vous plongerez dans un monde encore méconnu que les jardiniers gourmets ne tarderont pas à apprivoiser : la culture des champignons comestibles.
Nous vous souhaitons une bonne lecture et au plaisir d’échanger avec vous sur nos blogs !

https://jardinonssolvivant.fr/WordPress/wp-content/uploads/2012/04/En-symbiose-avec-son-potager.pdf

Ce livret est sous licence creative commons, c’est à dire que vous pouvez le distribuer librement, le donner à qui vous voulez et le mettre en libre
téléchargement sur votre site web. Toutefois, vous ne pouvez pas modifier son contenu, ni vous servir d’une partie des textes ou photos a moins d’avoir une autorisation écrite des auteurs. Si une telle autorisation vous intéresse, contactez-nous !

Catégories
Jardinons

La destruction des couverts végétaux

Pour ceux qui ont vu leurs couverts végétaux hivernaux résister au gel du mois de février qui fut exceptionnel dans de nombreuses régions de France, la question de la destruction commence désormais à se poser. Et en particulier quand et comment détruire ?

Quand ?

Si le calendrier cultural le permet, le mieux est d’attendre le plus longtemps possible, idéalement jusqu’à la floraison, voire un peu après. En effet, la plante est beaucoup plus vulnérable à ce moment, alors que si vous cherchez à la détruire plus tôt, elle a de plus grandes chances de repartir et donc de gêner la culture qui suit.

Cette règle amène à une date de destruction située entre la mi-avril et la mi-mai. Cela peut sembler très tardif, mais cela permet aussi de maximiser la production de biomasse par le couvert et donc les transferts d’énergie, de carbone, éventuellement d’azote provenant de l’atmosphère… des plantes vers le sol, l’effet fertilisant est donc ainsi maximisé. Le seul problème qui risque de se poser est le séchage du profil de sol si le printemps est sec. Si vous avez les moyens d’arroser abondamment à la mise en place des cultures suivantes, ce n’est pas trop gênant, mais si ce n‘est pas le cas, vous serez obligé de surveiller de près ce paramètre et donc de détruire prématurément le couvert peut être dès la mi-avril si la météo n’annonce pas d’eau dans la semaine qui suit. Le risque alors est que le couvert soit mal détruit et qu’il faille désherber manuellement les repousses, ce qui, à l’échelle d’un potager, demeure gérable.

Comment ?

Dans le cadre du jardinage sol vivant, je vous propose de proscrire la destruction par enfouissement et la destruction chimique. En effet, la première, outre le travail du sol qu’elle nécessite, risque d’accumuler des matières organiques dans le sol, provoquant un pic brutal d’activité bactérienne qui consomme tout l’oxygène présent, rendant ainsi le sol autour des débris en décomposition momentanément anaérobie. Quant à la seconde, si elle encore difficilement évitable en grandes cultures, elle peut être beaucoup plus facilement évitée en jardinage où un « loupé » sur la destruction aurait des conséquences gérables.

Parmi les solutions mécaniques qui nous sont accessibles, je vous propose d’explorer les suivantes :

  • Le sarclage
  • Le roulage
  • Le broyage
  • La fauche
  • Le bâchage

Le sarclage :

Passer le couvert à la binette est une possibilité acceptable sur quelques mètres carrés, au-delà ce travail devient vite très pénible et nécessite en plus un travail de l’horizon superficiel, ce qui peut être problématique si le sol est humide lors de l’intervention.

Destruction d\’un couvert végétal (Biomax) en avril 2010

Le roulage :

Rouler le couvert avec un rouleau à lames, type rolofaca serait l’idéal si un tel matériel existait pour les jardiniers, ce qui n’est malheureusement pas le cas. Il est toutefois possible de bricoler un appareil à l’action comparable : le « Crimp-o-matic » de John Hayden, composé d’une cornière, d’une planche de bois et de deux ficelles. Ces dernières permettent au jardinier de tenir la planche de bois sur laquelle il appuie de tout son poids pour écraser la végétation, la cornière, située sous la planche, blesse les plante et diminue ainsi leurs chance de repousse.

Le broyage :

Broyer le couvert, par exemple avec une tondeuse en position haute, ou un gyrobroyeur, si vous pouvez avoir accès à ce type de matériel, est une solution relativement simple à mettre en œuvre, à condition que le couvert soit au moins à floraison. Toutefois, il sera préférable d’attendre que celle-ci soit passée car le principal défaut de ce mode de destruction est son impact son les insectes qui vivent sur les plantes et en particulier les pollinisateurs.

La fauche :

Si vous savez vous servir d’une faux ou que vous disposez d’une motofaucheuse, la fauche est une alternative intéressante au broyage, mais la destruction risque d’être plus incomplète et ce mode de destruction n’est envisageable que sur un couvert bien développé.

Le bâchage :

Oui, avec un « â », pas avec un « ê » ! C’est un mode de destruction simple et efficace même sur un couvert jeune : cette technique consiste à faucher le couvert et y poser une bâche noire type bâche d’ensilage. Au printemps, d’après Laurent Welsch, maraîcher du Sud Ouest adepte de cette pratique, trois semaines suffisent pour détruire les plantes du couvert. Après cela la bâche peut être rangée jusqu’au printemps suivant. C’est vrai que l’esthétique n’est pas au rendez vous pendant ces trois semaines, mais cela fonctionne plutôt bien, le sol n’est pas perturbé et le début de décomposition des parties aériennes du couvert stimulé.

Voilà pour mon petit topo sur le sujet, je vous invite à le compléter avec vos expériences et connaissances dans les commentaires ci-dessous !

Note du 2 mai: Pour des informations complémentaire sur le sujet, je vous invite à visiter l’article de Yann Labuche de Terre d’Humus sur le même sujet: http://www.terredhumus.fr/-actualits-19/104-28avr12-detruire-ses-engrais-verts

Catégories
Jardiniers-reporters

Jardiner en climat méditerranéen par Léa Cambien

Bonjour à tous. Récemment, j’avais demandé à Gilles s’il ne pouvait pas concocter un article sur le jardinage en climat méditerranéen, ayant moi-même eu l’occasion de mettre en place avec mon copain un potager dans la région des Vans (limite entre le Gard, Lozère et l’Ardèche, région sèche dans les contreforts des Cévennes). Mais pour amorcer la discussion, j’ai eu envie de partager avec vous le déroulement et les résultats de cette saison de jardinage 2011, ayant dans l’espoir de susciter chez vous quelques commentaires. (Photos sous licence cc by-sa 2.0, présentées dans un ordre non chronologique).

Situation et conditions locales

Vue sur le Chassezac

Un ami nous a permis ce printemps-été de mettre en place un potager sur son terrain gardois : une ancienne châtaigneraie en terrasses schisteuses, larges et relativement pentues, surplombant la rivière du Chassezac.

Ce terrain avait été défriché (châtaigniers abattus), puis ratissé et nettoyé de ses résidus de branches et de feuilles pour favoriser la repousse d’un couvert d’herbes spontanées. Ces terres à nu ont par la suite pas mal été malmenées par le climat aride de l’été et les fameux épisodes cévenols automnaux. Malgré une érosion importante, des plantes pionnières ont pu s’implanter, progressivement. Mais généralement, au cœur de l’été, cette végétation sèche, brûlée par le soleil.

Cette vallée est par ailleurs très exposée aux vents violents.

Une partie de ce terrain avait déjà été mise en culture depuis quelques années, un potager y était réalisé (sans paillage du sol) et donnait je crois des résultats assez moyens. Il faut dire que si le paysage est magnifique, le sol, quant à lui, est loin de faire rêver. Hyper léger, hyper caillouteux, hyper drainant, peu de terre.

Pour donner une idée d’une partie encore jamais cultivée. On voit sur la photo ce qu’on a dénommé « la poubelle à graines » : toutes les graines jugées périmées, surnuméraires ou non sélectionnées pour la semence sont semées sur une zone à peine travaillée puis paillée, rarement arrosée. Poussera ce qui voudra.

A partir de là, mon copain et moi avons eu envie d’essayer la butte. Lui avait déjà une bonne expérience de « potagiste » dans ces terres, mais la culture en butte c’était du nouveau. Ça présentait déjà l’avantage évident d’augmenter la profondeur de terre, mais ça permettait aussi de cultiver sur un terrain pentu (plus de pente en aval de la butte), ça pouvait limiter les phénomènes d’érosion et favoriser l’infiltration des pluies grâce à la rétention d’eau entre chaque butte.

A notre arrivée sur le terrain, à partir de fin avril, on a donc commencé la mise en place du potager sur les zones travaillées les années précédentes, réparties sur deux terrasses. Le montage des buttes s’est fait en trois sessions : la première fin avril-début mai, la deuxième sur une terrasse en dessous en mai, et la dernière fin juillet, à la suite d’une culture de seigle parvenue à terme.

Pour commencer, nous avons « grelinetté » le sol et réservé les maigres plantes arrachées (sedums, linaires, résédas entre autres) pour un paillage ultérieur. Après ça, pour la constitution des buttes, nous avons été plus ou moins méthodiques, et n’avons pas scrupuleusement respecté les différentes strates du sol. D’ailleurs, la terre en profondeur semblait davantage argileuse, les argiles ayant probablement été lessivées au fil du temps, et ça semblait intéressant de les ramener en surface pour constituer une terre plus rétentrice. On a rempli quantité de seaux avec les cailloux qu’on trouvait… les pierres ça peut parfois être utile, mais trop c’est trop si ça fait du sol une passoire.

Au final, les buttes n’étaient pas très hautes et moyennement larges (mois d’1,20 m), et les allées étroites.

Paillage

Puis, on a paillé tout ça… avec les mottes et les quelques plantes arrachées, avec des herbes sèches issues des débroussaillages de terrasses dans le hameau voisin, avec de la paille pourrissante abandonnée, avec des fougères, et avec du buis pour couvrir les allées. L’objectif n°1 était d’amener le maximum de matière trouvée dans les parages. Par contre, on n’a pas osé utiliser les feuilles de châtaignier, ressource pourtant la plus abondante localement : trop longues à la décomposition, trop grandes, trop légères et soumises au vent… mais on a peut-être eu tort de ne pas profiter de cette manne ?

Les épluchures de légumes allaient dorénavant directement aux buttes.

Paillage de seigle sur les buttes les plus récemment mises en place (courant juillet), repiquages de salades sur les pentes et semis en carrés sur les plats de buttes. Les buttes végétalisées au fond sur la deuxième photo sont les premières a avoir été montées, fin avril.

Semis et repiquages

Comme pour le paillage, un des objectifs lors des semis était de favoriser la constitution d’une forte biomasse, pour apporter toujours plus de matière aux buttes.

Avant de pailler certaines buttes, on a semé à la volée des graines de panais dont on ne croyait plus trop en la faculté germinative, des tournesols, de la phacélie. Aux bas des buttes, on a semé des poquets de luzerne tous les 50 cm, dans les allées aussi, à la volée, avec de la roquette (dont les graines ne manquaient pas).

Comme on a démarré le potager assez tard, on a au départ beaucoup repiqué de plants achetés ou qu’on avait eu la chance de recevoir en cadeaux (tomates surtout, mais aussi choux, blettes, courges, poireaux, œillets, fenouils, et quelques plants de salades). Dans le même temps, on a semé de tout, soit en poquets, soit en aménageant des carrés sans paillage (micro-parcelles à la JM Lespinasse) dans lesquels on effectuait les semis de radis, navets, carottes, betteraves, etc.

Pour les repiquages et les semis, la difficulté première était de protéger les plants et plantules d’un rayonnement solaire très intense. Des cagettes, des claies, des feuilles, des herbes… tout y passait pour ombrager pendant les heures chaudes… sinon c’était grillé. Les plantes bénéficiant de l’ombre fournie par quelques arbres disséminés sur le terrain (chêne vert et châtaignier) étaient à ce titre plutôt favorisées. L’agroforesterie prend à mon avis tout son sens dans ces régions très ensoleillées.

Ombre de châtaignier vs ensoleillement maximal. Des cagettes sont utilisées pour protéger les repiquages de salades ou jeunes semis

Les semis en micro-parcelles étaient déjà un peu trop exposés au soleil et à la sécheresse, les germinations étant inégales, et peut-être que des semis en ligne auraient été plus appropriés, bien que moins faciles à réaliser ?

Semis et repiquages ont été effectués sans utilisation de compost ou terreau puisqu’il n’y en avait pas de disponible.

Arrosages

De manière surprenante, on n’a pas eu à s’inquiéter de l’eau : elle est restée disponible tout l’été malgré une sécheresse inquiétante. Le ruisseau où s’effectuait le captage ne s’est jamais arrêté de couler. L’eau était stockée dans une cuve de 1000 litres quatre terrasses au-dessus du jardin, qui pourvoyait largement à nos arrosages quotidiens… avec de la pression en plus !

Tous les soirs on arrosait le jardin généreusement, au tuyau : on n’a pas trop fait à l’économie et on a préféré assurer le coup pour les plantes fragiles et les semis. Les tomates et cucurbitacées étaient arrosées au plus deux fois par semaine. On maintenait aussi le paillage humide pour éviter le dessèchement et accélérer sa décomposition. On utilisait aussi l’asperseur pour diminuer les temps d’arrosage sur les plantes qui ne craignaient pas d’avoir le feuillage mouillé.

Semis spontanés

Des cultures des années précédentes se sont ressemées : cosmos, shiso (basilic japonais) et aneth. Les adventices qui poussaient sur les buttes faisaient l’objet d’un désherbage sélectif : j’aimais bien laisser les pissenlits, chénopodes, et quelques plantes indéterminées que je laissais fleurir pour voir ce qu’elles avaient à offrir. Des matricaires ont d’ailleurs fait une intervention assez musclée sur une des buttes, mais ont été conservées (tant qu’elles n’empiétaient pas trop sur les cultures) pour leur belle floraison, le cortège d’insectes qui en bénéficiaient, et la prolificité du feuillage qui pouvait ultérieurement fournir un paillage des plus appréciables.

Invasion de matricaire

Résultats sur les cultures

Un des gros échecs, ça a été les salades, dont la reprise après repiquage était toujours très difficile : protection indispensable contre le soleil au repiquage, puis développement des plants très lent, pour une montaison à graines très rapide. Même avec un semis direct, le résultat n’était pas souvent fameux. En revanche, les plants en mottes achetés sur le marché prenaient beaucoup mieux. J’imagine qu’on avait tendance à repiquer trop tôt, et qu’il fallait surtout éviter les racines nues. Le sol étant particulièrement séchant, un apport de terreau ou compost aurait probablement facilité la reprise.

Du côté des salades un peu moins conventionnelles, les mizuna japonaises (différentes de la roquette) se sont parfaitement acclimatées et ont rapidement fourni quantité de feuilles tout au long de l’été. Vu qu’on les sentait très à leur aise, on en a repiqué beaucoup et on a profité de cette abondance de feuilles pour pailler d’autres légumes.

La mizuna, une brassicacée à déguster en salade composée, ou à cuire
Paillage de plants de salades en difficulté avec des feuilles de mizuna

Les haricots nains, mange-tout et à écosser, ont bien marché. Les Contender ont produit toute la saison, les Coco Blanc et surtout les Black Turtle ont été très prolifiques, fournissant de surcroît une masse verte abondante. De bons apports pour un sol bien appauvri.

Les haricots nains avaient tendance à empiéter sur les allées, ayant été semés un peu bas sur les buttes, et certains ont dû pâtir de déplacement trop brutaux.

Les haricots à rames, par contre, n’ont pas réussi à grimper sur les jolies installations qu’on leur avait préparées en bambous et longues branches de châtaigniers. On ne les a pas trop aidés en les semant en plein couloir venté, le vent décrochant sans cesse les tiges qui cherchaient à s’agripper aux supports. On les avait semés entre des lignes de maïs, en bordure de terrasse, sur une zone très caillouteuse et jamais travaillée, « grelinettée » et paillée avec de la fougère. Autant dire que ça n’a pas été un grand succès. Mais une fois de plus, ça aura eu le mérite d’apporter de la matière sur une zone nouvellement cultivée.

Lorsque les semis ont bien démarré, on a eu de jolis radis, navets, carottes et betteraves. Bon, ce n’était pas du gros calibre, mais des racines généralement bien saines. Ont particulièrement bien poussé le radis rond (énorme), un gros radis d’été dit fourrager mais qui se mange très bien  (le Raifort d’Ardèche), et un radis japonais du type daïkon.

Les choux cabus repiqués dans les zones ombragées par les arbres (sur des buttes montées sur une ancienne zone de compost) ont très bien marché, et ont pommé. Ceux repiqués ailleurs se sont moins plus.

Pour les tomates, on les avait repiquées en sommet de buttes, sans tuteurage et sans taille. Pour les tomates cerise, ce n’était pas franchement une bonne idée puisqu’elles envahissaient littéralement l’espace et les allées. On a pensé qu’il valait mieux en fait les tuteurer (ou les planter en bas de bute et les faire monter), parce que les tiges avaient tendance à descendre vers le bas des buttes (mauvaise irrigation en sève des fruits?), ou à casser quand il y avait des vents forts. Au final, le nombre de pieds a pallié une productivité moyenne. Pas mal de tomates se gâtaient rapidement (zones de pourrissement), mais les récoltes sont restées plutôt bonnes, avec toutefois des tomates pas super « goûtues ».

Pour les cucurbitacées, constat très mitigé. Au démarrage, la végétation et la production ont explosé pour les courgettes. Et puis, au bout d’un mois, une courgette par ci une autre par là… plus grand-chose. On a pu observer un gros ralentissement de la fructification, les courgettes en formation coulaient rapidement. Peut-être avons-nous eu tendance à ramasser les courgettes trop grosses.

Pour les arrosages de cucurbitacées, on a opté pour le matin, avant le lever du soleil, deux fois par semaine.

Contre l’oïdium, début août, on a fait deux traitements au soufre : ça a bien un peu ralenti sa progression au début mais après c’était plus la peine. Petit à petit, à la mi-août, l’oïdium s’est un peu généralisé au jardin : les navets, radis, mizuna, consoude, ont tous pris le blanc. J’associe ça à un coup de mou généralisé au potager. Je me dis qu’après avoir été bien remué pour faire les buttes, le sol avait dû relarguer de l’azote, puis progressivement s’appauvrir au fil des mois, à défaut de nouveaux apports rapidement assimilables.

Mais le temps de cet été a probablement aussi bien joué : très sec, souvent un peu nuageux (ce qui a pu retarder certaines mises à fruits), de grosses cagnes en août, des vents parfois très violents avec quelques gros orages qui ont laissé derrière eux une atmosphère humide.

Avant d’être ravagée, voilà à quoi ressemblait une butte mixte courgettes-courges, ces dernières étant supposées aller se balader dans les maïs et haricots à rames.

Petite synthèse

Si je devais comparer les cultures à plat et celles en buttes, je dirais que ces dernières ont incontestablement été les mieux réussies. Il faut dire que les buttes ont été plus soigneusement épierrées, et que la terre y a davantage été remuée en profondeur (les surfaces plates ont simplement été « grelinettées »). Sur le plat, les rendements ont été quasi nuls.

Par ailleurs, il m’a semblé que le paillage avec les mottes d’herbes arrachées était beaucoup moins approprié que le paillage à la paille ou au foin. La butte essentiellement paillée avec des mottes a eu un rendement très faible comparé aux autres. Mon impression est que ce type de paillage était trop dense et ne permettait pas une bonne respiration du sol et une bonne infiltration de l’eau. Seuls les tournesols semés avant de pailler ont poussé normalement.

Après cette saison de jardinage, le paillage nous a donc paru vraiment indispensable : pour conserver un peu d’humidité au sol, pour réduire les phénomènes d’érosion et pour attirer et favoriser le développement d’une faune sous le sol et en surface.

Sur ce type de terrain, il semble important de travailler sur les espèces et variétés cultivées, au moins pendant le temps de la mise en place d’un système plus fertile (principalement dépendant de la structure du sol, je dirais). Miser sur ce qui marche, produire et apporter de la matière pour enrichir le sol en humus et l’aider à mieux retenir l’eau et les éléments fertilisants. Ce sol ne paraît pas encore tout à fait prêt à accueillir décemment de jeunes salades.

Par ailleurs, l’ombrage de certaines cultures (salades notamment) aux heures chaudes reste indispensable… et pour ça, rien ne vaut quelques arbres dispersés dans le potager.

Vue générale des buttes du bas
Catégories
Jardinons

Comment vont vos jardins avec ce froid glacial?

La vague de froid qui s’abat sur la France n’est pas sans conséquences pour nos jardins. En effet la végétation était déjà très avancée suite à l’extrême douceur de l’automne et du mois de janvier, ce qui la rend très vulnérable à ce froid particulièrement vif. Par exemple, dans le jardin de mes parents, dans le Gers, couvert végétaux et cultures d’hiver vont la grise mine.

Voici l’état des couvert et d’une culture de fèves vers la mi-janvier:

Soit un développement présentant environ 2 mois d’avance par rapport à ce que nous avions observés en 2011! Les fèves avaient déjà été désherbées une fois, alors que d’habitude cette opération attend début mars

Voilà à quoi ressemble une planche de fèves et pois grimpants à présent:

Les pois tiennent encore la route, mais pas pour longtemps, je crains, bon demain les température devraient remonter, espérons que ça soit bon pour eux.

Quant aux fèves j’ose espérer qu’elle repartirons du pied, mais je n’en suis pas si sûr… On verra bien.

Quant aux couverts, la moutarde a été totalement détruite, heureusement les autres plantes présentes semblent être encore là, espérons qu’elles prennent le relais.

Au pire, on ramène quand même pas de biomasse au sol, c’est toujours ça…

Et chez vous comment ça se passe? Ceux qui jardinent dans des régions plus froides ont-ils des conseils à donner aux méridionaux peu habitués à ce genre d’aléa climatiques?

Catégories
Jardiniers-reporters

Trucs et astuces pour réduire son empreinte écologique au jardin Par Jacques Subra

Pour débuter 2012 sur de bonnes résolutions, Jacques, désormais un invité habitué de ce blog, nous partages ses trucs et astuces pour réduire son empreinte écologique au jardin, alors faisons le plein de bonnes idées!

Je voudrais aborder dans cette chronique un autre aspect de notre démarche commune, nous tous, animateurs et lecteurs du blog « jardinons sol vivant » et ouvrir le débat sur nôtre Empreinte écologique.

Nous sommes tous très attentifs à soigner notre sol, le nourrir de façon naturelle selon différentes techniques, tendre vers la pratique du non labour, ne pas employer de produits issu de la chimie..etc

Dans notre conduite quotidienne, nous devons en permanence nous poser certaines questions : quel est l’impact sur l’environnement ? Combien çà coute ? Y a-t-il une autre démarche possible ? Bien sûr, cela ne doit pas devenir obsessionnel, mais avec le temps cela devient si naturel que nous le faisons sans réfléchir, comme par exemple trier nos déchets.

Chez les jardiniers « sol vivant » nous sommes tous d’accord sur le fait que les intrants extérieurs doivent être réduits au strict nécessaire. Les coûts de production de nos légumes et fruits doivent être le plus bas possible. Sinon mieux vaut les acheter!

Mes visites dans les jardineries se limitent au strict minimum, les tentations sont grandes devant ces rayons surchargés de fournitures en grande partie inutiles au jardinier.

Dans certains cas, on ne peut échapper à leur utilisation, mais leur emploi ne doit pas être systématique.

Pour ma part j’utilise en cas de besoin et à faible dose, la bouillie bordelaise, le souffre, le savon noir et quand les attaques par les limaces et escargots sur les semis deviennent insupportables, du ferramol.

Ceci bien sûr en complément des décoctions de plantes.

Jamais aucun amendement du commerce.

Le jardinier doit développer son sens de la débrouille, de la « récup ». Le matériel et les objets doivent avoir plusieurs vies.

Personnellement, je bricole beaucoup, donc je récupère tout ce qui me semble pouvoir resservir un jour. Cela prend un peu de place mais les économies réalisées sont substantielles.

Certains gestes qui paraissent anodins, mis bout à bout, deviennent importants pour la protection de l’environnement.

J’ai un terrain de 5000m2 avec jardin et verger+ un bois de 3500m2, cela demande un certain outillage à moteur thermique ( motoculteur, tronçonneuse, taille-haie, débroussailleuse, tondeuse, broyeur à BRF, atomiseur pour les traitements des arbres fruitiers et un mini tracteur pour le transport du bois, fumiers, terre…)

Les moteurs de ces matériels sont très polluants, et je dois dire que je culpabilise à les employer. Mais comment faire?

J’ai déjà supprimé depuis plusieurs années le motoculteur, vu que je pratique le non labour il ne m’est plus utile. J’ai aussi réduit considérablement l’emploie du taille haie. Un coupe branche et une bonne cisaille font l’affaire, et le travail est plus propre.

La tondeuse est une auto-tractée et j’ai très peu de vraie «pelouse », quelques dizaines de m2 autour de la maison. Le reste est en prairie que je fauche après floraison.

Comme je fais mon bois, j’utilise la tronçonneuse, elle est incontournable.

L’atomiseur sert 2 à 3 fois par an pour les traitements des fruitiers à l’argile.

J’essaie donc de réduire au maximum l’emploi de ces matériels et je porte mes efforts d’économie sur d’autres postes

Il y a bien sûr l’incontournable récupérateur d’eau. Tout jardinier digne de ce nom doit récupérer un maximum d’eau de pluie ( chez moi la réserve est de 3000L ).

Les toilettes sèches, installées au jardin, sont aussi source d’économie d’eau. Sait-on que près de 20% de l’eau potable part dans les toilettes ? Et que cela représente 60% du retraitement en stations d’épuration? Le compost produit ( en composteur séparé ) sert à fertiliser les arbres et arbustes.

Pour la fabrication de nos toilettes sèches, seuls l’abattant et quatre charnières sont du commerce, tout le reste est de la « récup ».

Tous mes piquets et tuteurs sont en bambous et servent plusieurs années.

Je récupère les ficelles des bottes de foin et paille pour les liens et pour faire grimper les tomates en serre ( seulement celles en sisal, pas les plastiques)

Pour les liquides destinés aux pulvérisation, les collants de dames sont des filtres efficaces.

Ce sont aussi d’excellents liens pour attacher les jeunes arbres aux piquets lors de la plantation.

Les étiquettes pour les semis et plantations sont découpées dans des cageots de bois récupérés en grande surface. Elles peuvent ensuite partir au compost.

Les godets me sont fournis par des amis qui ne les réutilisent pas.

Pour attacher – tomates, poivrons, aubergines… – je découpe dans les vieux tee-shirt en coton

des bandelettes de 2cm de large. Le coton étant biodégradable tout part au compost.

Quand je ramasse les légumes, je les lave au jardin avec l’eau de pluie dans un bac destiné à cet effet. Ainsi je récupère la terre que je restitue au jardin.

Une partie des bois de tailles font du BRF, avec le reste je fais des fagots qui servent à chauffer le four à pain.

Voilà quelques trucs et astuces pour réduire les coûts et impacter le moins possible l’environnement.

Je compte sur vous tous pour nous donner les vôtres et ainsi faire profiter au plus grand nombre.

Jacques Subra

http://lagranderecree.asso-web.com/34+jardin-bio-de-jacques.html

Catégories
Jardiniers-reporters

Compostage à froid : Le « mille-feuilles de BRF à la Bretonne » par Gilles Bernard

Voici un nouvel article invité écrit par un de mes correspondants bretons: Gilles Bernard qui avait déjà contribué à mon blog cet été. Le voici de retour avec un article expliquant sa production de compost à basse température pour pour réaliser ses semis en godets.

En jardinage naturel, les pratiques sont variées, et à côté des puristes (comme Gilles 😉 ) qui limitent leurs apports organiques aux seuls compostages de surfaces, il y a ceux qui, ponctuellement,  « aident » la nature par quelques apports de compost.

Je fais partie de cette deuxième catégorie, et cet apport s’opère via les godets de plantation. Je privilégie en effet, chaque fois que possible, un semis en godets de compost pur opéré en mini-serre.

Le jardinage est toujours affaire de compromis : entre  le « laisser faire la nature » et risquer de voir les légumes céder le pas aux adventices et au prédateurs, et le « tout contrôler à tout prix » et risquer de créer un milieu de culture purement artificiel, j’ai opéré cet arbitrage consistant à mener la phase de démarrage des plants sous parfait contrôle en serre pour ensuite livrer la plante à son développement naturel sans la moindre intervention dans la phase de plein air.

Je vois dans cette pratique plusieurs avantages :

  • plantations précoces,
  • meilleur contrôle des prédateurs, limaces en particulier,
  • contrôle des adventices,
  • travail à hauteur
  • raccourcissement du cycle végétatif de plein air et donc possibilité d’enchaîner jusque 3 récoltes par an dans les carrés.

Du coup se pose pour moi la question de l’approvisionnement en compost, car pour 100m² de carrés potagers, il me faut garnir dans les 2000 godets, soit un besoin de 300 litres de compost bien mûr tamisé.

Je pratique le compostage en tas, et recycle tout ce qui peut me tomber sous la main.

Pas un article sur le compostage qui ne parle d’une forte montée en température dès les premiers jours, gage indiscutable d’un compost réussi. Des températures de 50 à 70° apparaissent comme un passage obligé : un beau tas de compost est un compost qui fume.

Pourtant, dans la nature, rien de semblable : imaginez une forêt dont le sous-sol monterait pareillement en température ! Adieu cèpes et girolles, adieu scarabées et salamandres… Il y aurait bien le tas de foin mouillé», ou le tas d’algues vertes sur les côtes bretonnes qui chauffent eux aussi très fort, mais rien de bien naturel dans ces situations, en tout cas pas de celles qu’on voudrait reproduire au jardin.

Pourtant le dogme est là : il faut que ça chauffe !

Très attaché à suivre ces préconisations académiques, je me suis moi-même employé, pendant des années, à réunir les conditions pour faire de mon compost une véritable « centrale thermique » : matières vertes à l’excès, humidité, aération.

Pourtant, un jour, un tas a « foiré », les températures restant désespérément basses. Arrosage, retournement, rien n’y a fait ! Délaissant ce tas de compost facétieux et retors, j’ai fini par l’oublier au fond du jardin. Puis vint le jour où me décidant à recycler ces matériaux, ne serait-ce que pour faire de la place, surprise, j’ai découvert un compost bien noir, mûr à souhait, à l’odeur d’humus prononcé.

Puis au fil des années, le phénomène s’est reproduit de façon fortuite, une fois, deux fois et chaque fois ce même résultat : l’un des plus beaux composts jamais obtenus.

D’où cette interrogation : ce dogme ne serait-il pas tout simplement le reflet d’une société où on doit à tout prix gagner du temps, reproduisant au jardin des réflexes de productivité qui n’y ont pas leur place !

les matériaux ont été rassemblés sur l’aire de compostage : végétaux aquatiques (ici, du cresson issu de ma mare), BRF (branches de pommiers et de figuiers récupérées chez un voisin ), litière de volaille peu chargée, algues (en bord de mer, la récolte des algues en échouage est une véritable aubaine pour les jardiniers), vieux compost

Si comme moi, vous pensez que le jardinage naturel c’est aussi la réappropriation du temps long, et pour peu que vous soyez tentés de reproduire le phénomène d’humification naturel vous déciderez peut être un jour de conduire votre tas de compost en basse température.

Si l’expérience vous tente, voici quelques conseils issus de plusieurs années de pratique :

  • Varier les matériaux : un tas de compost composé d’un seul élément devient rapidement ingérable et un assemblage de 5 matériaux différents me semble un bon compromis.
  • Combiner intelligemment déchets carbonés et déchets azotés. On associera en strates successives les matières carbonées (brunes, dures, et sèches telles que feuilles, vieux foins, pailles, litières peu chargées, BRF) et les matières azotées (vertes, molles, déchets ménagers, tontes, mauvaises herbes, plantes aquatiques…)
les matériaux sont assemblés en tas par couche successives de quelques centimètres d’épaisseur
  • Ne pas trop arroser, voire ne pas arroser du tout. La fermentation basse ne s’accompagne que d’une très faible évaporation d’eau, à la différence des fermentations hautes. De plus, un excès d’eau diminue la quantité d’air contenu dans le compost, et peut conduire au développement de processus anaérobie s’accompagnant de composés volatils nauséabonds (méthane, hydrogène sulfuré, ammoniac)
  • Aménager des zones tampons : prévoir de façon régulière une strate d’un matériau présentant une bonne inertie thermique : une couche constituée de quelques fourchées de vieux compost constitueront un obstacle à la « propagation » des hautes températures. Un BRF sec (obtenu à partir de fagots fanés, ou BRF vert étalé au grand air pendant quelques jours) jouera un rôle équivalent.
  • Aérer le tas : les japonais placent verticalement dans leur tas, au moment de l’assemblage, quelques bambous qui seront retirés après 2 ou 3 jours, constituant autant de cheminées d’aération.
le tas terminé fait une belle hauteur, il se tassera d’un bon tiers en 1 mois

Voici quelques éléments d’explication un peu plus techniques :

Dans un compostage à chaud, la rapide montée en température correspond à une multiplication rapide des bactéries mésophiles (aptes à vivre dans des températures de 30 à 50°) puis thermophiles (aptes à vivre dans des températures de 50 à 90°), bactéries qui dans le processus de dégradation de la matière organique vont rapidement s’attaquer aux composés les plus dégradables (glucoses, amidons…).

Suit, après quelques semaines, une deuxième phase dite de « maturation » : tandis que les températures se stabilisent entre 30 et 50°, une nouvelle génération de bactéries associée à des champignons et des actinomycètes va engager  la dégradation des composés les plus résistants (celluloses lignines…), et progressivement mettre en œuvre la biosynthèse des composés humiques.

Dans notre compost « raté », nous avons sauté la première étape, et les micro-organismes de la phase maturation ont assuré seuls le processus d’humification.

Pour conclure, je vous propose de balayer quelques objections « faciles » :

  • Objection n° 1 : les graines de mauvaises herbes habituellement détruites dans la phase de chauffe ne seront pas détruites dans le compostage à froid. Mon expérience personnelle me fait dire que quelles que soient les méthodes de compostage, le jardinier n’échappe pas au sarclage, malheureusement, et je n’ai pas remarqué que les adventices soient plus ou moins présents avec ce compost.
  • Objection n°2 : les éléments pathogènes habituellement détruits dans la phase de chauffe ne seront pas détruits dans le compostage à basse température. Hormis le cas d’incorporation de résidus de toilettes sèches qui appellent la plus grande prudence, et ce quelle que soit la technique de compostage utilisée, je ne vois pas quels éléments pathogènes pourraient être préoccupants.
  • Objection n°3 : le temps de compostage est singulièrement rallongé. En fait, pas tant que ça, et 6 mois suffisent pour obtenir un compost acceptable, 1 an de maturation étant quand même l’idéal
toute la basse-cour est très intéressée par l’opération!
Catégories
Jardiniers-reporters

Le potager : une source d’étonnement – par Loïc Vauclin

Article invité écrit par Loïc Vauclin du blog mon potager en carré.

Comme je vous l’ai déjà évoqué dans la présentation de mon potager en carré, ma terre était plutôt du genre stérile et très sableuse. Les 2 premières années de culture traditionnelle à plat m’ont plutôt découragées. Seulement l’échec est un moteur chez moi, j’aime bien contourner les problèmes et les solutionner. C’est l’expérimentation qui permet de trouver des solutions. Expérimenter c’est aussi prendre des risques. Seulement il faut bien admettre que les risques pris en tant que jardinier sont plutôt réduits. Le principal est celui de travailler au jardin sans obtenir la moindre récolte. Mais parfois on fait des découvertes intéressantes. En voici quelques une qui me concernent.

Un légume se ressème ?

En appliquant les conseils que j’ai glanés sur internet, j’ai étalé la totalité de mon bac à compost sur mes carrés de potager et sur quelques planches de culture. Ma surprise fut de récolter des pommes de terre genre vitelotte et des tomates sans avoir semé quoique ce soit. Je ne sais pas pourquoi mais j’avais l’à priori que l’on ne pouvait pas utiliser les graines de ses propres légumes pour faire des semis. A vrai dire je n’avais même jamais pris le temps d’y réfléchir. Et chaque année je ne manque pas de faire chauffer ma carte bleue dans les jardineries pour acheter des graines.  Aujourd’hui je me demande bien comment ce genre d’idée a pu germer dans ma tête. Surtout que je ne suis pas le seul dans ce cas ! Y aurait-il un travail de lobbying là derrière ?

Bref, c’est tellement facile de récolter ses graines que je ne vais plus m’en priver. Cette idée m’a ouvert de nouveau horizon. J’ai découvert qu’il y avait une volonté de préserver le patrimoine légume. Des jardinier luttent pour préserver des variétés anciennes, comme notamment de choux de saint Saëns,près de chez moi. J’ai pris conscience que le travail de sélection des jardiniers amateurs mérite d’être conservé, surtout quand on voit la vitesse de propagation des variétés hybrides. J’ai décidé de travailler avec des variétés fixées et de me lancer dans la sexualité des plantes .

La capacité de la nature à se régénérer

Mes actions pour favoriser la biodiversité dans mon potager restent facileà entreprendre et à la portée de tous. Je suis néanmoins surpris de voir comment de petites actions peuvent amener de grands changements. Voici quelques-unes de ces actions :

Planter quelques fleurs mellifères et laisser quelques fleurs sauvage se développer permet de voir les insectes recoloniser votre jardin. Bien que je sois en pleine ville j’ai pu voir des insectes vraiment impressionnant. En laissant une place plus grande à la spontanéité de la nature, j’ai pu ainsi découvrir une nouvelle fleur : l’onagre. Elle a quasiment recouvert tout mon jardin, et je me dis qu’il y a surement une bonne raison à cela.

Le retour des champignons fut aussi une découverte agréable. Depuis longtemps chaque saison je vais chercher des cèpes en forets et systématiquement je jette les épluchures dans mon jardin. Seulement je n’ai jamais vu un cèpe pousser. Par contre depuis que j’utilise le BRF, non seulement un réseau important de mycélium a colonisé le terrain, mais je vois aussi des champignons pousser çà et là.

Pailler le sol avec mes déchets verts et ma poubelle à épluchure ont considérablement modifié mon jardin. Avant je ne voyais par un ver, aujourd’hui il suffit que j’écarte un peu le mulch pour voir quantité de vers se recroqueviller. Le paillage offre un environnement propice au développement de la faune du sol. Aujourd’hui mon sol grouille de vie et le développement de mes légumes a progressé.

Les vers ne sont pas les seuls à investir le paillage, il y a aussi des bestioles moins sympas comme les limaces. Forcement ma première réaction de jardinier était de sortir le tue limace. J’avais quand même pris soins de rendre le poison inaccessible pour les autres animaux.

Après quelques sorties nocturne pour tenter de pulvériser mon ennemie, j’ai fini par renoncer, enlever mes pièges et me dire je laisse faire on verra bien.

Le laisser faire au potager.

Ce n’est pas facile de laisser ses salades se faire bouffer. Mais j’ai fini par me dire que cette quantité impressionnant de gastéropode allez bien finir par intéresser quelqu’un. Au bout de quelques mois, j’ai vu les premiers carabes courir dans le potager. Un hérisson aussi à pointé son nez. Je ne dis pas que la population des limaces est déjà maintenue sous pression, mais la nature fait son travail et je suis sûr d’aller vers un équilibre. J’essaie de mettre en pratique les principes de l’agriculture sauvage.

J’adopte cette politique pour tous maintenant, et je subi des pertes. Je ne vous dis pas mes pieds de tomates cette année. Mais j’ai quand même pu en profiter. Le mildiou a tout ravagé mi-aout avec le fort taux d’humidité. J’ai refusé de traiter a la bouilli bordelaise car son action sur les champignons n’est pas ciblé. Je n’ai même pas pris le soin de brûler les pieds contaminés. Je les ai laissé sécher sur place puis passé au broyeur. Je vous dirais l’été prochain comment se portent mes tomates. Je risque peut être de déchanter mais j’ai la conviction que plus mon jardin sera riche en biodiversité plus fortes seront mes cultures.

Apparence du potager naturel.

Depuis que je laisse la nature un peu plus libre je découvre une nouvelle réaction de mon entourage.

–         Ba alors t’as laissé tomber ton jardin !

–         Mais c’est la brousse chez toi

–         Ba dit ! C’est pas très bien entretenu ton potager.

Notre vision du jardin est bien formatée, dans l’esprit de bon nombre de jardinier, un potager entretenu c’est un potager avec une terre totalement nu et découverte. C’est des légumes planté au cordeau et regroupé. Tout le contraire de ce qu’il faudrait faire ! Mais d’où nous vient cette pratique ? Comment a-t-on réussit à nous convaincre de procéder ainsi ? Sans vouloir imaginer le complot partout, j’imagine quand même que notre héritage de jardinier vient bien de quelque part. Qu’en pensez-vous ?  Croyez-vous que nos méthodes de jardinages sont le résultat du travail du marketing des industriels de la chimie ?